Palestine : la pêche à l’hôpital

Un infirmier se tient devant la porte d’un service de l’hôpital Ibn Sina à Jénine, en Cisjordanie occupée, le 30 janvier 2024. © Zain JAAFAR / AFP

 

Bonjour!

 

Tu occupes un territoire.
Tu en isoles une partie: pas de port, pas d’aéroport, pas de droit de pêche dans la mer qui est partout, pas de passages aux frontières.
L’autre partie, tu la colonises de la plus simple des façons. Tu expropries, tu chasses les gens, tu arrêtes au hasard, une bonne vieille façon qui grâce à toi ne prend pas une ride. C’est une cure de jouvence pour l’histoire mondiale de la colonisation, qui te remercie. Tu réussis dans la même tradition à sous-traiter une partie de tes opérations de police à des « locaux » .

Qui est l’agresseur?  Les enfants te jettent des cailloux, et certains adultes un peu plus que ça. Les journaux amis répètent avec toi, que cela te donne le droit de te défendre, et donc, que tu te défends. C’est une bonne nouvelle pour les profs de langue du monde entier, car leurs dictionnaires sont enrichis: un agresseur, ça se défend, un agresseur, ça a le droit de se défendre. (Les profs de géographie ont déjà eu leur cadeau: l’Atlantique-Nord, ça va jusqu’en Afghanistan.)

Et eux, qui sont-ils, les parents et les voisins de ceux qui jettent des cailloux? Leur premier tort est énorme, et on se demande s’il est réparable: ils ont le tort d’être là.
Tes grands-parents l’avaient bien chanté, et avec quelle immense satisfaction, lorsqu’ils se sont saisis de ce territoire en 1948: « Une terre sans peuple pour un peuple sans terre » . Il a quand même fallu exproprier et exiler 750.000 de ces inexistants, mais bon, une fois fait, la place était nette et le mantra exact, pensaient tes grands-parents: les profs de philo enrichissent leur concept « penser ».

…Mais venons-en à la nouvelle du jour. En bref, il y a des résistants qu’il faut bien appeler terroristes, et tu as trouvé un bon truc pour les ramasser, ces types qui te terrorisent.
Un truc qu’on va appeler « la pêche à l’hôpital ».
L’hôpital te sert de filet, d’épuisette, ou de nasse.

Tu as jeté des bombes partout, les bombes guidées sur des cibles précises, par exemple les journalistes, et les bombes idiotes, sans précision, que dans le pays de tes fournisseurs on appelle les dumb bombs (les bombes idiotes), des américaines de 900 kilos. Ça tombe on ne sait jamais très bien où, et une seule détruit un quartier, qui a le tort d’exister.
Il y a malheureusement des survivants, personne n’étant parfait, et parmi eux, des combattants blessés qui se retrouvent soignés à l’hôpital – ce qui est peut-être un crime de guerre, mais tu t’occuperas des médecins plus tard.
La bonne nouvelle, c’est qu’un type soigné à l’hôpital ne bouge pas beaucoup, et qu’il va y rester un peu de temps, à l’hôpital.
Tu as ton réseau dans l’hôpital, tu as le temps d’être informé, et c’est simple, tu vas tuer les types dans leur lit.

Tu te défends.

 

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Article Le Monde/AFP de ce 30 janvier: « Trois Palestiniens tués par des forces israéliennes dans un hôpital en Cisjordanie » – L’armée, la sécurité intérieure et la police israélienne ont dit avoir « neutralisé » au cours d’une opération conjointe un « terroriste du Hamas », ainsi que « deux autres terroristes ».
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