Typhanie Afschrift

Photo Dominique Duchesnes, lesoir.be

 

Bonjour!

Connaissez-vous Typhanie Afschrift? À 71 ans, elle vient de mourir après une crise cardiaque et une chute consécutive qui l’ont menée au coma.
Je l’ai découverte en 2022 quand elle a rendu publique sa transition de genre. Née Thierry, elle a été père et est devenue Typhanie à l’âge mûr. Un de mes potes commente: « C’est dingue ». – Oui.

Les transgenres sont une énigme indéchiffrable par la philosophie ou par la psychanalyse, ils et elles représentent un élément du réel réfractaire à notre culture occidentale gréco-rationaliste, alors qu’il est accepté en toute simplicité comme une réalité par un certain nombre, ou un nombre certain, de cultures humaines. Il y a des peuples premiers nord-américains où ces humains sont très respectés et considérés comme les meilleurs éducateurs de l’enfance.
Un ami qui a connu la Thaïlande dans les années 1970 m’a rapporté que de longue date déjà dans ce pays, il y avait alors des toilettes « Hommes », « Femmes », et « Autres ».
Les Bugis d’Indonésie reconnaissent cinq sexes, tandis que les anthropologues se disputent sur les nombreuses qualifications ni-homme/ni-femme rencontrées dans des sociétés américaines, océaniennes ou asiatiques.
Et ainsi de suite.

Revenons à la Belge Typhanie Afschrift. Elle est un exemple, un modèle dans certains cercles sociaux très conservateurs, de la transition de genre. Comme dit dans l’article ci-dessous, cette avocate fiscaliste internationale était aussi une libertarienne qui a consacré ses talents, qui sont grands, au service de la richesse et des inégalités: une ennemie du peuple donc (1). Mais en tant qu’être humain, elle a longtemps été malheureuse comme se sentant femme dans un corps d’homme, un destin qui n’est pas plus choisi que celui des hétéro- ou homosexuel·le·s quel·le·s (2) qu’ils et elles soient. Vous êtes un hétérosexuel « dans la masse », un homme cisgenre comme « iels » disent? Vous ne l’avez en rien choisi.

Réfléchissez donc, les genré(e)s suprémacistes occidentaux, et fichez la paix à celles et ceux qui ne sont pas comme vous. Pourquoi tant de haine? Seule une peur in-nommable fonde votre refus.
Notons que le capitalisme, si les polémiques du genre ne nuisent pas au taux de profit, peut accepter sans sourciller cette évolution qu’il nomme « culturelle ». Mais si sa crise le mène au fascisme, sans sourciller davantage il s’alignera. « Le fascisme n’est pas le contraire de la démocratie », disait Bertolt Brecht, « mais son évolution en temps de crise ».

Au vrai, les hétéros intégristes des deux genres sont des hétérophobes: ils et elles haïssent, et craignent, la différence.

lesoir.be :

Par Pascal Martin, journaliste au pôle Idées

Publié le 19/04/2025 à 18:39 Temps de lecture: 1 min

Typhanie Afschrift est décédée ce samedi, à l’âge de 71 ans. L’avocate avait auparavant sombré dans le coma à la suite d’une chute accidentelle, consécutive à une crise cardiaque.

« C’est une de ces nouvelles qui vous saisissent à la gorge, écrit Amid Faljaoui., son ami et directeur de Trends-Tendances. Une de celles qui, en quelques mots, suspendent le temps, parce qu’elles bouleversent à la fois la raison et le cœur. Typhanie Afschrift nous a quittés. Et avec elle s’éteint une voix rare, singulière, profondément libre. »

Typhanie Afschrift était une avocate fiscaliste de renommée internationale, professeur à l’ULB, auteure et chroniqueuse respectée. Une plume, un humour tranchant, une érudition, une intelligence… : ses proches égrènent ses qualités. Spécialiste du droit fiscal en Belgique et à l’international, elle dirigeait le cabinet « Afschrift Tax & Legal ». Elle était inscrite à plusieurs barreaux, notamment ceux du Grand-Duché de Luxembourg, de Genève, de Madrid, de Hong Kong, de Bruxelles et d’Anvers.

« Son expertise et sa capacité de travail lui apportaient bien sûr la clientèle de grandes sociétés commerciales. Mais cela ne l’empêchait pas d’aider des gens qui n’avaient pas les moyens, sans rien demander. Elle avait un côté humaniste, une vision de la société où elle montrait son attachement total à l’Homme avec un ‘grand H’», commente l’ex-juge d’instruction et auteur Michel Claise.

Plusieurs témoignages décrivent une personnalité atypique. « Typhanie n’a jamais cherché à plaire. Elle a toujours préféré convaincre », écrit encore Amid Faljaoui. « Elle n’a jamais cédé à l’air du temps. Elle a toujours choisi le souffle long de la rigueur, de l’argumentation, de la liberté de pensée (…) Elle interrogeait les certitudes, traquait les incohérences du système fiscal et démontait les raisonnements paresseux. »

À lire aussi Typhanie Afschrift: «J’ai toujours été une femme, enfermée dans un corps d’homme»

La dernière chronique de Typhanie Afschrift parue dans Trends-Tendances était intitulée La force des États-Unis. Elle pointait les fragilités européennes devant l’adversité, fragilités attribuées principalement à l’Etat providence. L’auteure y soulignait la persistance de l’idéal américain, suffisamment robuste pour traverser toutes les épreuves, y compris la présidence d’un Donald Trump…

L’économiste Bruno Colmant salue « une femme de conviction, une libertarienne qui se donnait un droit de sécession avec l’Etat. Elle estimait que le fisc belge calcifiait l’esprit d’entreprise et paralysait l’économie. Elle n’aimait ni l’entre-soi belge, ni la culture du compromis. C’était une voix dissonante, solitaire. Elle a mené toute sa vie un combat de la solitude, en tant que femme bien sûr, mais aussi sur le plan professionnel. »

Une longue quête personnelle

En juillet 2022, Typhanie Afschrift avait surpris en annonçant publiquement sa transition de genre. Celle qui s’appelait jusqu’alors Thierry choisissait désormais de vivre pleinement son identité féminine, révélant au grand jour une vérité longtemps gardée secrète. « Ce jour-là, se souvient Michel Claise, je lui ai dit en riant que je perdais mon meilleur ami. Elle était devenue ma meilleure amie. »

« Je suis une femme », affirmait simplement Typhanie Afschrift dans une interview parue dans nos colonnes le 7 juillet 2022. « Si on me demande comment je le suis devenue, je réponds que je suis transgenre mais mon idée est que j’ai toujours été une femme enfermée dans un corps d’homme, et qui n’apparaissait pas, y compris à mes propres yeux. »

Cette décision, mûrement réfléchie, s’inscrivait dans une longue quête personnelle. Typhanie Afschrift évoquait ainsi son enfance : « Quand j’étais petite, j’avais un mal-être important. Je détestais mon corps. Mais je ne me suis pas dit que j’étais transgenre, parce que personne ne savait ce que c’était. Cette notion n’existait pas. »

La prise de conscience de sa véritable identité s’était faite progressivement : « Vers 20-25 ans, je me disais ‘pas de chance d’être né homme, j’aurais voulu être une femme’. Mais j’étais résignée. » Ce n’est que beaucoup plus tard, avec l’évolution des mentalités et une meilleure compréhension de la transidentité, qu’elle avait commencé à envisager une transition ». Au milieu de la décennie précédente, Thierry en passe de devenir Typhanie s’était demandé si « ça vaut la peine de devenir une vieille femme ? » Réponse : « J’ai pensé que c’était trop tard, vu mon âge. Et là, je me suis révoltée contre moi-même ! Il est toujours temps. Je ne voulais pas me sentir larguée, sans vie qui vaille la peine. »

Une thérapie lui avait permis d’accomplir un travail de clarification intérieure. Elle avait réalisé sa transition à son rythme, pas à pas : « J’ai déjà pu vivre une demi-vie entièrement en tant que femme épanouie en Suisse. Dans mon bureau de Genève, la plupart de mes clients n’ont jamais connu que Typhanie ».

« Ce n’est pas une renaissance, c’est une libération », résumait-elle. Cette transition, vécue comme un accomplissement personnel, s’inscrivait parfaitement dans sa philosophie de liberté. Comme le souligne Trends-Tendances, « en assumant publiquement sa transition de genre, elle a fait preuve d’un courage rare. […] Ce ne fut ni un coup médiatique, ni une revendication narcissique. Ce fut un acte d’authenticité. Un geste de liberté, encore une fois.

  1. Et son laudateur fier de se déclarer son ami, Amid Faljaoui, qui a longtemps représenté la chronique pseudo-économiste de la radio de service (pseudo?-)public francophone belge, est politiquement de la même eau.[]
  2. Mon clavier aussi est genré, et particulièrement dans la langue française qui ne connaît pas le genre neutre. Le point à mi-hauteur n’y existe pas. Il me faut taper <ALT + 0183-pavé numérique > pour sortir ce signe du ventre de l’informatique mondialisée.[]

Une réflexion au sujet de « Typhanie Afschrift »

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