L’indexation ou échelle mobile des salaires en Belgique

Illustration Journal.lutte-ouvriere.org, fournie par DuckDuckGo

 

Bonjour!

L’indexation des salaires, appelée échelle mobile en France, est un trésor d’après-guerre de la sécurité sociale en Belgique. Le principe est simple: d’une façon automatique prévue par la loi, les salaires sont adaptés à la hausse des prix à la consommation. Voyons en pratique.
Le journal Le Soir donne ici (en ligne ou PDF), sous la signature de Cécile Danjou, une synthèse de la situation actuelle, qui verra les salaires de centaines de milliers d’ouvriers et employés augmenter autour de 11 % en janvier, en conséquence de l’inflation.

Cette mesure a été obtenue par les syndicats après la seconde guerre mondiale, lorsqu’en raison d’un appareil productif très peu détruit en comparaison des pays voisins, le patronat belge prospérait à belle allure, et tout à ses bénéfices à court terme, ne s’est pas opposé à un engagement dont il se mordra les doigts pendant longtemps. Quelques années plus tard, l’industrie belge allait se retrouver avec des installations industrielles d’avant-guerre face à des concurrents équipés de neuf.

L’indexation se fait en rapport à un indice officiel des prix à la consommation des ménages, utile par ailleurs aux économistes. Le système a été érodé sans cesse, post-libéralisme oblige, mais jamais abandonné malgré les hauts cris des employeurs, ces toujours plaintifs. Contrairement à ce que dit l’article du Soir, la Belgique n’est pas le seul pays européen à connaître cette mesure: le Grand-duché de Luxembourg aussi. L’Union Européenne ayant parmi ses mantras « Pas touche au Luxembourg », la disposition grand-ducale intouchable a protégé la belge des arguments européens de réduction au moins-disant social.

Comme l’article du Soir le précise, l’indexation des salaires, fonctionnaires compris, se décline selon deux modalités.

Les uns, « la grande majorité » dit Le Soir, voient leur salaire adapté une fois par an, en général le 1er janvier, ou parfois en juillet. Ce sera le cas en janvier pour la CP200, commission paritaire regroupant 60.000 entreprises et 500.000 employés, l’horeca (hôtels, restaurants, cafés), le transport, l’industrie et le commerce alimentaires, le secteur de l’électricité. Les salaires d’autres secteurs, comme celui des constructions métalliques (métal, automobile, aéronautique), soumis au même régime annuel mais en juillet, ont été indexés de 8,14 % cet été.

Les autres sont soumis au régime dit de l’index pivot: lorsque l’indice des prix à la consommation, ici « indice-pivot »,  montre 2% ou plus de croissance des prix, les salaires se voient revalorisés de ce pourcentage le mois suivant. La mesure touche les fonctionnaires, le non-marchand (santé, maisons de repos, hôpitaux), les assurances, la sidérurgie, le commerce de détail, les employés de la grande distribution, la chimie, ainsi que les allocations sociales (chômage, incapacité de travail, allocations familiales) et les pensions.

Un trésor d’après-guerre, disais-je.

D’innombrables escarmouches, je le signalais, ont érodé le système. Non abordées dans l’article, elles méritent d’être relevées
D’une part le gouvernement fédéral décide parfois, avec un pouvoir de conviction variable selon les groupes sociaux et en vertu du rapport de force idéologique et politique du moment (« loi relative à la promotion de l’emploi », sic), globalement défavorable aux salariés depuis des décennies, un report « conjoncturel » de l’indexation des salaires, dit « saut d’index ».
D’autre part, l’indice des prix de référence a été modifié, et n’est plus celui des origines, dit des prix à la consommation des ménages, toujours existant pour d’autres usages, notamment académiques. En retirant de la liste des prix observés, les hydrocarbures, dont on voit l’importance actuelle dans l’inflation, les boissons alcoolisées et le tabac, trois secteurs à haut rendement fiscal, on obtient une valeur affichant le titre euphémisant d’« indice-santé ». Entre l’euphémisme, marque de notre époque, et l’hypocrisie éternelle, il y a l’épaisseur d’un papier à cigarette, souvent absent on le sait.
L’indice est « lissé », et donc « moins volatile », on ne prend que 98 % du calcul, chipoteries qui nous rappellent les 27 modifications du calcul du taux de chômage officiel durant les trois dernières années du gouvernement Thatcher au Royaume-Uni. On se demande cui bono, comme aiment le dire les Américains: pour qui cela est-il bon.
Remarquons aussi que l’indexation annuelle, si elle aboutit le jour de son exécution au même salaire brut que l’indexation-pivot qui y arrive par étapes de 2 %, prive les bénéficiaires de tout ajustement pendant douze mois.

En réalité, la puissance actuelle de traitement des données diverses et variables ne s’opposerait en rien à une indexation automatique mensuelle.
Qu’en dites-vous, messieurs dames du 2.0 ?

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