« Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part »

 

Centre fermé à Vottem, photo sanspapiers.skynetblogs.be

 

 

Bonjour!

 

Je suis quand même une fois fier de mon pays !

On a un roi ruisselant de bons sentiments – enfin, çuilà je le compte pas, normalement un monarque ça n’existe pas en démocratie.

On a un pouvoir législatif fondu, dans la sagesse, comme le Maredsous, c’est écrit dans tous les livres pour la jeunesse et sur le couvercle du fromage.

On a un gouvernement bourré, comme le précédent, Lire la suite

1929 – 1989 – 2009

(Publié sur Cemab.be)

La crise financière d’aujourd’hui pourrait passer dans l’histoire comme « celle de 2009 », car il se peut que nous n’assistions pour le moment qu’à la mise en place de ses conditions initiales et qu’elle s’aggrave encore pour connaître plus tard, l’an prochain par exemple, son acmé, qui est aussi un gouffre. Cela n’est pas certain, mais n’est pas impossible. Quoi qu’il en soit, me voilà disposer d’un titre, et grâce à Philippe Gibbon (1), qui mettait de côté une coupure de presse il y a dix-neuf ans, en se « doutant qu’elle servirait un jour»,  j’ai aussi une illustration.

Venons-en à notre sujet, qui est l’actualité financière.

Décrire quelques engrenages ne suffit pas.
Il faut comprendre qu’il y a une impasse logique dans le système, et qu’il s’agit d’une crise que l’on peut appeler à bon droit « systémique ».

Nous assistons dans l’ensemble des pays riches à une forte réduction, depuis trente ans, de la part des salaires dans le P.I.B. Au moins 10 pour-cent de la totalité des richesses produites annuellement, qui allaient précédemment à la part des revenus du travail, s’ajoutent désormais à celle qui revenait aux revenus de la propriété.
Cela signifie, humainement parlant, une agression inouïe contre les classes populaires, inouïe au sens propre vu qu’elle est largement inaudible-invisible dans les médias, qui représentent peu ou prou le Moniteur Officiel des Représentations. Les S.D.F. et la pauvreté, le chômage persistant à deux chiffres, la déglingue des budgets sociaux, la stagnation des salaires, l’explosion des loyers d’habitation et du prix des immeubles… sont la traduction sensible de ces chiffres abstraits.
D’un autre côté, sur le plan de la logique économique, cette évolution représente à terme une baisse de la demande et une tendance à la récession, même si provisoirement s’y oppose un « adoucissement » tout involontaire, à savoir le recours de plus en plus massif au crédit, conçu bien entendu au premier chef comme une source de profits, une extension, historiquement toujours nécessaire, de l’aire de jeu du capital, plutôt que comme un soutien à la demande.

S’agissant des États-Unis, dans ce pays le recours à l’endettement ne connaît pas de limite extérieure: le monde entier accepte leur dette. C’est un effet d’empire. Le capitalisme US ne peut gripper que de l’intérieur, comme en 1929, parce que de l’extérieur aucun de ses partenaires et rivaux n’a intérêt à provoquer sa chute, même ceux qui comme la Chine ou les fonds souverains (2) détiennent sur lui une telle quantité de créances qu’ils en ont techniquement les moyens. Il faut bien voir que l’économie étasunienne a un statut unique au monde, annulant les règles de change ou d’équilibre des balances extérieures qui s’imposent à tout autre pays – et à des années-lumières de toute analogie avec la saine gestion d’un budget personnel ou familial.
Il est d’ailleurs vraisemblable que l’un des aspects historiques de la présente crise soit justement une étape vers la fin de ce statut impérial, une fin qui est à long terme tout à fait certaine. (3)
Cela n’empêcherait cependant pas l’étranger, la panique une fois installée, d’aggraver la crise par des retraits massifs.

Dans ce contexte et dans une période historique de capitalisme triomphant, où c’est d’ailleurs le démocrate Clinton et le gouvernement du socialiste Mitterrand qui ont, en leurs territoires respectifs et parmi d’autres, parachevé la dérégulation financière, il faut bien voir que la financiarisation de l’économie n’a connu aucune limite politique ou réglementaire, en particulier aux EU. Il s’ensuit, dans ces conditions, que seule l’implosion des marchés financiers, seul leur plongeon dans le vide d’une société mise à sac, peut ramener au réel la folie de la bulle boursière (4), puisque n’y pourvoit aucune autre limitation : ni la « raison » humaine, ni la « bonne gouvernance » autoproclamée, ni aucune forme du sens de la responsabilité collective, inexistante au gouvernail des États et des institutions internationales, ne se sont manifestées.
Cette impasse logique est certaine, et depuis des décennies ! Simplement, son rythme se déploie sur une ou deux générations humaines. Et tout aussi simplement, le temps qu’elle impose sa loi, certains se sont approprié des montagnes de richesses produites par l’effort commun.

Il faut bien voir que la crise des subprimes et de leur titrisation (5) n’est que l’aspect anecdotique de la limite enfin atteinte, et non une cause, tandis que les revenus et « parachutes » indécents des grands patrons, équivalant à plusieurs siècles de revenus modestes, ne présentent qu’un effet médiatisable, parfois applaudi, de cette dérive aveugle, moralement illégitime, faut-il le dire, et économiquement irresponsable.
On croit rêver ! La caste des « décideurs » se prétend coureuse de risques. Elle se déclare récompensée au mérite. Elle s’invite aux débats de société, pour donner ses leçons à propos du chômage, alors qu’elle y trouve son intérêt puisque les licenciements font monter les cours en bourse, et alors qu’elle ne « donne du travail » ou ne « crée de l’emploi » qu’à condition, par structure (et non par un trait de caractère plus ou moins dévoyé), de faire un bénéfice sur chaque heure payée. Ses représentants viennent à toute occasion dire leur mot sur l’éducation, dont ils entendent tirer profit, soit immédiatement en ouvrant de nouveaux marchés, soit à plus long terme en réduisant l’école à un centre de formation pour soldats de la guerre économique (6). Au bout du compte et par divers chantages proportionnels à sa capacité de nuisance, qui balaie large entre asphyxie de l’activité productive et pièges à l’emploi, cette caste demande l’impunité.
Quant à la face sombre des événements, celle de la souffrance sociale quotidienne, des jeunesses sans emploi, des salaires de la peur et des fins de vie amères, elle reste à sa place dans l’ombre, loin des projecteurs.

La finance qui « par nature » devrait avoir pour fonction de servir l’économie productive, la domine au contraire depuis les années 80. Elle en est devenue un pur prédateur. Inévitablement la proie, dans un premier temps les débiteurs des crédits hypothécaires US, devient exsangue, et le circuit s’assèche.

La crise de 1929 avait poussé les gouvernements du monde capitaliste à dresser des parois étanches entre les banques et la bourse, pour éviter qu’une crise de l’une ne s’étende aux autres. Mais ces cloisons ont fondu dans l’enthousiasme de la « fin de l’histoire » et de la restauration conservatrice à l’œuvre depuis les années 80, survoltée par l’implosion du communisme réel en 1989. On voit bien que la plupart des banques sont aujourd’hui touchées par la « dérive » des produits du même nom, dont la valeur tend irrésistiblement vers zéro. Pour parler simplement : les banques, et les sociétés d’assurance, jouent en bourse. Comme en 1929, l’effondrement boursier s’étend aujourd’hui au secteur bancaire et des assurances, et menace des pans entiers de l’économie dite réelle.

C’est le retour d’une histoire qui n’aurait jamais dû se répéter, et la preuve que l’économie est une chose trop sérieuse pour être confiée aux financiers, aux grands patrons de tout poil, aux libéraux de tous les partis, aux économistes à collier. (7)
Pareillement, dans une démocratie qui ne se paie pas de mots, le pouvoir ne peut être confié à celui qui le brigue – qu’il le brigue est au contraire une raison de ne pas le lui donner. La charge du pouvoir doit être imposée à des gens qui n’en veulent pas, mais l’acceptent par souci du bien commun, par exemple parce que leur nom a été tiré au sort. On verrait alors l’économie devenir servante, ce qui était un souhait de Keynes, et le pouvoir changer de nature.

Où en sommes-nous ce deux octobre ? La crise est certainement historique. L’hypothèse qu’elle passe dans l’histoire comme la « crise de 2009 » et que nous n’en soyons qu’au déploiement de ses conditions initiales n’est pas incompatible avec les avertissements de Nouriel Roubini, de l’université Columbia à New York. Cet ancien conseiller du président Clinton a prévu chaque malheur de la planète Bourse depuis un et demi. Il redoute aujourd’hui une panique internationale qui emporterait le marché des prêts interbancaires à court terme, soit 1.000 milliards de dollars de liquidités prêtes à opter pour l’état gazeux ou solide, « illiquide ». Il qualifie la débâcle de systémique et d’une gravité sans précédent.
Si l’on peut dire que la crise des subprimes est une « anecdote » dans la mécanique en œuvre, c’est dans le sens qu’elle n’est en rien une cause de fond. Elle représente toutefois dans le réel une vraie terreur en son pays d’origine. Pour la low middle class dans un premier temps, pour tous les autres propriétaires moyens ensuite, elle ruine le credo libéral-libertarien, et surtout sa pratique, « ma maison, c’est ma pension », valides seulement si se confirme l’hypothèse d’une éternelle croissance de la valeur des maisons. À supposer que cette crise concerne environ 8 millions d’habitations, et si nous supposons à l’unité un prix moyen de 125.000 dollars, voilà 1.000 milliards de dollars pourris qui ont commencé de tomber en poussière. La dégradation de ces créances atteignant les contrats hypothécaires à la fin des (alléchantes) deux premières années de remboursement à taux fixe, on sait que cette vague initiale agira jusqu’à la mi-2009. Les conséquences dureront …un peu plus longtemps.

En attendant, les défenseurs du marché « nationalisent » les pertes, nous donnant un aperçu sur le rôle que ces amis du genre humain donnent réellement à l’État. On n’a pas fini de rigoler, comme m’écrit Jean Bricmont ! L’usage du mot « nationalisations » pour décrire le sauvetage des financiers sur fonds publics a d’ailleurs tout l’air d’une machine à empêcher de penser. …Vous avez déjà vu une « nationalisation » à 49% ? « Nous vous sauvons de vos propres erreurs, mais bien entendu vous restez maîtres de vos machines à siphonner les richesses.. » Les gouvernements du Benelux sont les auteurs de cette révolution copernicienne. Et les ministres affirmant que cette virile « augmentation de la capacité d’emprunt du gouvernement » n’entraînera « aucun frais pour le contribuable » (8) tentent de prolonger la farce. Certains diront à leur décharge que jusqu’à présent les électeurs se sont laissé télépigeonner comme des c…loches.

Mais la pédagogie « des marchés » pourrait les faire changer de conduite.

Guy Leboutte

Pour la suite

Où chercher son information dans cette tourmente ?

Il y a le blog réellement incontournable, « La pompe à phynance« , tenu par Frédéric Lordon sur le site du Monde Diplomatique: . Le Diplo papier et son site restent bien entendus des sources qui valent le détour.

Il y a Nouriel Roubini cité ci-dessus. Nous trouvons en français : « Retour du risque systémique» (30 septembre). Et son blog , en anglais évidemment.

On ne peut négliger les études édifiantes et toujours d’actualité de Robert Denis, le seul journaliste d’investigation à s’être penché sur Clearstream, caillassé du coup par plus de 60 procès en justice, qu’il a presque tous gagnés, mais qui l’ont moralement épuisé, et dont le dernier pourrait l’endetter pour trois générations. Il faut absolument se souvenir de lui, le lire et le soutenir. On découvre dans cette affaire un monde secret et dangereux, où même l’idyllique Grand-Duché du Luxembourg a ses barbouzes et des manières au besoin très peu catholiques à l’encontre de ceux qui s’en prennent à l’opacité de son réseau bancaire. Voici l’adresse du blog de Denis, volontairement muet depuis juin 2008: http://www.ladominationdumonde.blogspot.com. Et faites un tour, nom de Dieu, sur le site de son comité de soutien: http://lesoutien.blogspot.com.

Il y a encore les textes de Jacques Sapir, de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, comme « Sept jours qui ébranlèrent la finance ».

Et n’oublions pas les précieux portails de référencement, qui font un grand travail de tri et de récolte sur Internet, comme Contre Info, avec beaucoup de traductions de l’anglais, le français Rezo.net et le local de l’épreuve mouvements.be .

Notes

(1) Voir son site et un de ses vieux dessins politiques.
(2) Fonds souverains : actifs financiers détenus par des États. Ils représentant des fonds de pensions (Norvège), des réserve de change (Chine) ou les excédents issus de la production de matières premières, dont le pétrole, qui génère les deux tiers des montants gérés par ces fonds.
(3) La devise « In God we trust » , présente sur chacun des milliards de billets verts qui circulent sur la planète, appartient de plus en plus, dans le sens que les dominants savent lui donner, « In Gold we trust », …à la Chine.
(4) Jacques Sapir cite Shakespeare, « Bien que ce soit de la folie, cela ne manque pas de méthode », dans « Sept jours qui ébranlèrent la finance »
(5) Le mécanisme des subprimes titrisées : « Crise des « subprimes » : Si vous n’avez toujours rien compris… »
(6) Pierre Bourdieu écrivait dans Libération du 4 décembre 1986, sous le titre « À quand un lycée Bernard Tapie ? » : « Proposer en idéal l’entreprise et la concurrence, c’est installer le vide au coeur du système de valeurs. »
(7) Ma mémoire hésite ici entre « Celui qui croit qu’une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste » de Kenneth E. Boulding, qui fut président de l’American Economic Association, et l’inoubliable « Les dinosaures ont vécu 150 millions d’années. Comment envisagez-vous une croissance équilibrée de 150 millions d’années ? »  de Friedrich Dürrenmatt.
(8) Phrase habillée par Benoît Cerexhe, ministre bruxellois de l’Économie et de l’Emploi.

L’Union européenne, au secours !

Les Dessous de Bruxelles, site Internet de dépollution mentale de la semaine

ENVOI:

 

«Ce qui est en train de se passer est une révolution silencieuse – une révolution silencieuse vers une gouvernance économique plus forte. Les États membres ont accepté – et j’espère que c’est ainsi qu’ils l’ont entendu – que les institutions disposent désormais d’importantes prérogatives concernant la surveillance et le contrôle strict des finances publiques.»

 José-M. Barroso, président de la Commission européenne, à l’European University Institute, juin 2010

«Le problème, c’est que, dans leur pays d’origine, les politiciens doivent obtenir des voix. Tandis qu’au sein de l’Union européenne ils peuvent avoir une vision d’ensemble.»
Caroline Walcot, secrétaire générale adjointe de l’ERT (European Round Table of Industrialists)
(Note de CB:   Pour rappel, l’ERT, ce sont les vilains capitalistes qui entre autres projets grandioses ont préparé depuis plus de trente ans une mainmise sur l’enseignement, désormais bien avancée, dans une Europe de quarante sept pays. – Voir les livres de Nico Hirtt)

 

*

 

Bonjour!

 

Si vous vous souvenez qu’un pays qui serait gouverné comme l’est l’Union Européenne, verrait sa candidature à ladite Union rejetée pour « manque de démocratie »,

Si vous voulez des portraits un peu débarrassés de l’eau de rose où on les noie d’habitude, des « pères » de l’ « Europe » (ouh! mais laquelle, ô laquelle?),
Jean Monnet
, prononcez money, avant tout banquier et affairiste, avec quelques années manquantes dans sa biographie, Paul-Henri Spaak, belge et ex-socialiste, spécialiste du retournement de veste, Robert Schuman, allumé du Saint-Esprit,
tous plus américanophiles les uns que les autres, au point que je me demande si le projet de l’Europe Unie n’est pas d’abord un projet US d’une US bis sur le vieux continent, un rêve de clonage, quoi,
ou de ceux, sans ombres, des plus récents, Herman Van Rompuy en catho haikuphile coincé – et surtout un peu anodin !, Davignon le vicompte  (orthographe vérifiée), José Manuel Barroso et sa bande de « commissaires à gages » , salués comme des « tchatchériens » par la presse britannique,
et de quelques autres,

Si vous aimez regarder dans le fond des yeux cette dite Union européenne, qui fait froid dans le dos à tout vrai démocrate, parce que vous ne voulez pas mourir idiots, mais au contraire vivre quelques années verticalement d’abord, et que vous savez avec La Boétie, qu’ « ils ne sont grands que parce que sous sommes à genoux » ,

Si de temps en temps, par souci de salubrité mentale, ce qui est un besoin vital dans le vacarme médiatique, vous aimez lire ou relire les « fondamentaux » des grandes impostures idéologiques indispensables à l’entretien de la démocratie partiale et partielle qu’est la représentation, laquelle a « pour vocation », expression empruntée à la novlangue bling-chic du gouvernement français, de tenir les peuples en minorité,

Si vous avez plaisir à lire quelques descriptions décapantes et sans révérence des machinations et de l’hypocrisie des mercenaires qui nous gouvernent en attendant de finir comme l’humaniste chrétien Jean-Luc Dehaene et tant d’autres, qu’ils s’affirment socialistes, réformateurs, démocrates, libéraux, sociaux, centristes, libertaires, écologistes ou ekologistes, dans des conseils d’administration de multinationales ou des conseils de consultance-counseling à haute redevance numéraire, si vous aimez le décapage, la déconstruction, de ces châteaux de cartes idéologiques, car cela vous rend plus intelligent et plus vivant, sans devoir vous-même procéder au décodage de l’actualité telle que décrite par la presse à l’eau tiède (« mainstream » ), vu qu’il vous plaît de garder votre vitalité pour autre chose que vous nettoyer les oreilles d’un torrent de mensonges et d’approximations.

Si…

Ah ah !

…Pour toutes ces raisons, qui sont loin d’épuiser le sujet… Notez dans vos favoris l’adresse de cette « échoppe tapie dans l’ombre » qu’anime « une poignée de guerrilleros luxembourgeois »  et lisez ce blog de dépollution mentale à haute matière grise ajoutée, qui a pour nom Les Dessous de Bruxelles.

L’actualité en cours, c’est: où en sommes-nous dans la socialisation des pertes de l’après-crise financière, la continuation de la privatisation des bénéfices ayant été assurée par déplacement des risques sur les États?
Entre ruine des États et austérité maximale pour les plus faibles, où en sont les triomphes du capitalisme et de la démocratie représentative ?

Bon remue-méninges!

Guy

Des fraises à Rostock

Rostock Heiligendamm – G8 – 06.06.2007

 

Bonjour!

La nature est magnifique en ce moment.
À Rostock aussi.
Les moissons lèvent, les forêts prospèrent.
Le vert des frondaisons est inimitablement pur et profond au mois de juin.

Avec cela, policier n’est décidément pas un métier comme les autres.
Mais combien utile! Pensez que sans eux, Poutine, Bush et consorts [dans leur G8] entendraient des cris à leurs fenêtres, ce serait évidemment inacceptable.

J’ai reçu un courrier du CADTM: « Les autorités allemandes ont utilisé des dispositions légales prises contre les hooligans au cours des dernières années (suite aux violences lors de matchs de football) et les ont appliquées à des manifestants politiques et pacifiques. » (On ne parle pas ici des deux mille membres de « black blocks » venus jusque du Japon pour en découdre.) « Sur les 1.100 arrestations auxquelles les autorités ont procédé, il semblerait que moins de 10 débouchent sur des poursuites. Cela paraît montrer que les autorités ont adopté une politique visant à empêcher un exercice normal des droits démocratiques.« 

À Rostock donc, des milliers de flics en tenue mi-moyenâgeuse, mi-futuriste, tentent par leur nombre et leurs équipements de contenir la foule bigarrée des contestataires. C’est plein de jeunes, il y en a donc encore qui font autre chose que soldat dans la guerre économique, et il y a aussi quelques vieux de mon âge. J’ai vu ça dans un reportage photographique sur le blocage de la porte 2 de la zone dite « rouge ». Les policiers et les militaires, comme les politiciens belges, aiment bien l’usage des couleurs pour simplifier l’étiquetage. Ça repose.

Je ne suis pas mécontent que des anonymes bravent le manque de sommeil et les intempéries, parfois les auto-pompes, pour défendre pacifiquement une démocratie d’en-bas en laquelle je me reconnais. Je me souviens qu’à Seattle en 1999 ces gens-là, que la société bien-pensante ne prend pas au sérieux, ont mis en échec le Millenium Round de l’OMC, Organisation Commerciale du Monde, aujourd’hui dirigée par un socialiste français, Pascal Lamy. Un socialiste qui dirige l’OMC, ça devrait convaincre les protestataires qu’ils sont ringards, et que la modernité, c’est la fin de l’histoire, pour ne rien dire de la fin de la lutte des classes. Las, le slogan « Tous humains, tous copains« , surtout lorsqu’il est asséné de ces tribunes-là, est une pédagogie qui ne réussit pas avec tout le monde.

*

Voter le 10 juin ne suffit pas vraiment au citoyen que je suis, dans un pays où la politique-spectacle et la marchandisation ont tout gangrené.
J’exagère? Voici un exemple entre mille. Dans l’école où je travaille, l’argent public finance l’éclairage des faces avant des distributeurs frigorifiques Coca-Cola et Danone, présents à l’intérieur de l’établissement (une présence qui en soi pose déjà une sacrée question). Deux tubes néon de 60 watts n’y servent à rien d’autre qu’assurer la publicité de ces multinationales, et à alourdir un peu la facture du refroidissement des précieux berlingots et canettes, puisque même des néons, ça chauffe. Ça coûtait 2.500 francs, soit 60 euros, par an et par distributeur en 1995, quand j’étais trésorier-adjoint de l’amicale (qui court après l’argent), et que je les avais débranchés. Comptez cent aujourd’hui.
Le monde progresse vers sa vérité marchande.

De temps en temps je vote donc avec mes pieds: une manif, ou avec mes mains: écrire un texte. Et par un achat: made in dignity, ou par un refus: fini les fraises espagnoles. D’autres fois, par un don.
Je préférerais m’occuper de mon jardin, mais le monde ne me laisse pas le choix.
L’arrestation sans explication ni poursuite, pour plusieurs jours, de quelques Belges à Rostock, m’a encore obligé d’écrire une lettre à l’ambassadeur de Belgique à Berlin. Réponse: « L’ambassade est en contact constant avec les autorités allemandes à Rostock ».
Chouette.

J’ai quand même versé un peu d’argent à Indymedia Deutschland, affilié allemand d’un large réseau de presse militante, présent aussi à Liège, à Bruxelles et un peu partout dans le monde. La presse « moyenne » (« main-stream« ) n’est plus vraiment un contre-pouvoir.
Il leur manquait 11.000 euros au 21 mai pour assurer les activités du Mediacenter à Rostock. Je ne sais s’ils les ont récoltés, mais je ne crois pas qu’ils aient budgétisé les menus objets cassés par la police. Ici bien tranquillement, on peut débrancher un néon inutile ou nuisible et leur verser une obole.

À plus !

Guy

Sang et CO2 à Bierset

(Article publié originellement sur acontrecourant.be)

 

« Un rapport réalisé il y a peu par un groupe d’ONG des Pays-Bas (United Civilians for Peace, UCP) indique que 90% des fleurs exportées par Israël sont exportées vers les Pays Bas avant d’être vendues au reste du monde. Selon ce même rapport, on compte environ deux vols de nuit par semaine vers le Luxembourg et dix vols de nuit par semaine vers l’aéroport de Liège, centre principal de transport aéronautique des produits d’Israël vers l’UE. »« La compagnie aérienne israélienne Cargo Air Line (CAL) ainsi que TNT (compagnie hollandaise qui, selon le rapport cité plus haut, entretient des liens avec les entreprises installées dans les colonies d’Israël) se sont installées très tôt à Bierset, où elles ont pu profiter de normes moins sévères qu’à Schiphol aux Pays-Bas. »(in Le commerce fructueux de l’exploitation, de l’expropriation et du vol http://www.radioairlibre.be//infos/Agrexco-Israel.htm)

*

Le directeur de Liège-Bierset adore son boulot. Dans un organe de la presse gratuite (la mal nommée), son sourire en couverture, il dit sa fierté de « travailler pour l’avenir de sa région ».

Il n’est pas le premier à confondre le court terme avec l’avenir, ni ses fins de mois personnelles avec la prospérité collective.

Vous avez remarqué comme les hommes d’affaires aiment se prendre pour des visionnaires, alors que la négation, qui se dit en leur langue « externalisation », celle des coûts, des problèmes et des concepts, est au coeur de leur pratique quotidienne et de leurs relations avec l’environnement, qu’il soit naturel ou social ?

Pendant combien d’années croyez-vous que de leur côté les affairistes publics wallons, maîtres d’oeuvre à Bierset, vont réussir à favoriser et imposer cette hérésie économique, politique, éthique et environnementale : avions chaque nuit pour les fleurs et fruits d’Israël, produits là-bas dans un des derniers États coloniaux de la planète, en une économie de rapine guerrière et théocratique, et en violation du droit international ?

*

« Agrexco appartient pour 50% à l’État israélien et tous les produits exportés [des colonies] de la Vallée du Jourdain sont emballés et vendus par eux. »

« (…) certains produits israéliens sont emballés en France ou en Suisse par Delhaize, Carrefour, Auchan, Monoprix, Intermarché ou Leclerc (jus de fruits Jaffaden), etc. avec un code barre français. »

« (…) L’exportation par Agrexco de marchandises provenant des colonies de Cisjordanie sont illégalement vendues en tant que « Produits d’Israël », tirant ainsi bénéfice des termes de l’échange préférentiel que l’Europe accorde aux importations israéliennes. »

« Les produits sont labellisés CARMEL, JAFFA ou STAR RUBY »

(Dans Apartheid et Agrexco dans la Vallée du Jourdain http://www.ism-suisse.org/news/article.php ?id=3769&type=campagne)

*

Les mains humiliées des cueilleurs sont couvertes de sang et le circuit de livraison est opaque : les participants à ce commerce d’avenir n’ont pas le courage d’afficher l’origine des produits. Au Delhaize, les avocats Carmel sont présentés dans des cartons espagnols, comme nombre de produits Agrexco en Europe. La traçabilité est brouillée et les fleurs seront en général vendues comme provenant des Pays-Bas : après la fable des Israéliens faisant pousser des oranges dans le désert, voici celle des Hollandais produisant des oeillets sous la neige.

À Bierset, une débauche d’aides publiques pas très regardantes pousse haut le coût public de l’emploi privé. Luc Misson, avocat des riverains, l’évaluait en 2004 et au bas mot, à 11.357.183 francs (281.500 euros) par unité. Mais le double est probable !

« – Le 20 juillet 2000, le Gouvernement wallon déclarait évaluer les dépenses à 18,5 milliards de francs belges. »

« – En mars 2003, la SOWAER qui assume cette mission actuellement, évalue les dépenses à 27 milliards de francs belges. »

« – L’évaluation a donc augmenté de 46 % en 3 ans. Il est généralement avancé par les autorités wallonnes que le développement et l’équipement de l’aéroport de Bierset coûtera 20 milliards de francs belges. 10 fois le budget annoncé en 1996 ! Pourtant nombreux sont ceux qui pensent qu’au total l’équipement de l’aéroport, les rachats et les insonorisations coûteront plus de 40 milliards de francs belges. »

« Nous pensons qu’on sera en bout de course plus près des 40 milliards que des 20 milliards annoncés mais le démontrer demanderait trop de développements. »

« Si même l’investissement public devait se limiter à 20 milliards, il faudrait de toute manière en conclure qu’à Bierset pour créer 1.761 emplois (souvent de mauvaise qualité), on dépenserait 11.357.183 francs par emploi créé. »

Et encore faut-il y ajouter un coût, qui n’est pas seulement économique, infligé aux riverains eux-mêmes.

Résumé:

1, 2, 3
* Cologne ne voulait plus de TNT.
* Schiphol est trop exigeant.
* Bierset accueille les nuisances, à l’unanimité de trois vieux partis, par l’odeur alléchés.

4, 5
* Des chômeurs acceptent des temps partiels de nuit, pour les fuir dès que possible : un tiers des ouvriers quittent TNT chaque année. (rapport Misson ci-dessus)
* En provenance de colonies d’Israël, illégal, camouflé, nocturne, honteux, polluant, bruyant, s’ensuit un transport de produits valant leur poids de sang, d’humiliation et de CO2.

et 6
* Ce que les électeurs n’auront pas la sagesse de refuser dans une saine prévoyance, le tarissement du pétrole à bon marché et la panique climatique l’imposeront dans la douleur.

 

Nicolas Hulot, une écologie sans politique

(Publié au départ dans La Libre, repris ou cité dans Courrier international, Grappe Belgique, Proxi-Liège, plennevaux.be/alexandre, Le pèlerin vagabond et quelques autres.)


L’appui unanime des médias aidant, Nicolas Hulot fait un tabac avec les malheurs de la planète. Sous le titre d’un « pacte écologique », qu’il veut « transpolitique », son livre et son site (1) font recette. Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal ont annoncé leur adhésion : voilà toujours entre ces deux-là une pomme de discorde écartée, un bout de terrain déminé – à moins que ce ne soit une vraie convergence.

Sophie Divry a publié dans les Cahiers de l’IEESDS n°1, pour decroissance.org, « Nicolas Hulot, le pacte médiatique » (2), une excellente mise en perspective des actes et discours de l’animateur vedette, ses pompes et ses oeuvres, amis et projets. Marketing et sponsoring, produits dérivés, lignes de véhicules 4×4 labellisées Ushuaïa… l’argent, le pétrole et le CO2 coulent à flot dans le sillage du télé écologiste de TF1.

Il faut, face à cette grande machine médiatique, recentrer la question écologique, loin de l’image du monde lénifiante que nous construit jour après jour l’industrie omniprésente du spectacle. Il faut rendre leur place à quelques constats massifs et accablants, qui pèsent sur l’humanité mais sont quotidiennement marginalisés dans la représentation collective. Si, comme on peut le penser, la question climatique est en passe de secouer, outre nos paysages, nos modes de vie et de vivre ensemble, tout enjeu tenu secret ou inconscient pourra prêter à des manipulations considérables.

Or un interdit « transpolitique » hante la politique officielle, consensuelle et télévisuelle. Chacun le respecte. Il porte sur les vraies causes de la pauvreté.

Prenons un exemple. En 2002, des enfants sont morts de faim en Argentine. Pourtant, ce pays au nom emblématique, de 38 millions d’habitants, assure une production agro-alimentaire permettant de nourrir 180 millions de personnes d’après Le Monde, ou 300 millions d’après L’Humanité (3). D’autres cas sont répertoriés, de contrées connaissant des famines mortelles alors qu’elles exportent du riz ou des biens de subsistance. L’Indochine française en était, vers 1947. Comment comprendre ces drames ?

Réfléchissons. La seule explication satisfaisante réside dans les rapports d’appropriation qui permettent aux uns, de disposer de la production, et aux autres, de vivre dans la misère. (Au passage, les discours patriotiques de solidarité nationale montrent ici leur fausseté, qui est leur vérité.) La faim dans le monde n’a pas d’autre logique. Aujourd’hui, l’Inde exporte des céréales alors que la moitié de ses enfants souffrent de malnutrition (4). Et sur une planète où la production alimentaire est de taille à largement suffire à l’humanité, 24.000 personnes meurent chaque jour des conséquences de la faim (5).

Chacun comprendra qu’il en va ainsi pour la question sociale dans son ensemble. La faim et la misère ne sont dues, ni à un manque de croissance économique, ni aux limites de la productivité agricole, elles sont un effet de la répartition sociale des ressources, une conséquence des rapports sociaux. Leur résorption n’est pas un défi technique ou scientifique, mais un problème de société, l’affaire de tous, une interrogation éminemment politique. La question sociale ne relève pas de l’expertise, mais du débat.

Alors débattons. Certaines vérités sont soigneusement occultées. Depuis l’antiquité, les élites ont consacré des efforts constants à travestir la réalité de la pauvreté, à l’adresse des gouvernés bien entendu, mais aussi pour leur propre paix de l’âme. John Kenneth Galbraith, économiste honnête alors au sommet d’une carrière où il a connu tous les honneurs, un Joseph Stiglitz (6) avant la lettre en somme, l’affirme dans un article célèbre, « L’art d’ignorer les pauvres » (PDF). Il nous explique comment de tout temps les pouvoirs se sont attachés à « évacuer la pauvreté de la conscience publique » (7).

L’ami des multinationales Nicolas Hulot s’inscrit sans conteste dans cette lignée ancestrale trop respectueuse – et trop profiteuse ! – des injustices sociales. Il travaille avec d’autres à un capitalisme vert qui sauvera l’essentiel : les inégalités. Rien de plus. Les Grünen allemands sont déjà largement gagnés à cette mouvance, et avec eux un nombre chaque jour croissant de patrons intelligents ou cyniques. Sophie Divry nous donne la liste des marchands de canons et de pollution qui soutiennent l’animateur de TF1.

Dans une page aujourd’hui disparue de son site figurait la question : « Les parisiens fortunés qui se rendent chaque week-end à Marrakech cesseront-ils d’y aller parce que leur billet d’avion coûtera 400 euros de plus ? » Audacieuse franchise ! La réponse donnée était positive, en raison d’un « effet d’entraînement » prétendument déjà observé… L’argument a été abandonné.

Si nous suivons des recommandations présentées comme techniques, à l’instar de celles, non pas transpolitiques, mais apolitiques, de Nicolas Hulot, les vrais pouvoirs seront libres de tout questionnement. A ce titre ils imposeront d’autant plus aisément des solutions inéquitables faisant payer le prix de l’ajustement, une fois de plus, aux plus pauvres. On ne pourrait alors qu’assister à une reconduction de la domination sous des formes inédites, avec une mystification idéologique renouvelée, où l’argument d’une contrainte écologique non socialement analysée remplacerait peu ou prou l’actuelle et supposée intangible loi des marchés.

Telle est, pauvres de tous les pays, la nouvelle nécessité que les grands médias vont vous vendre, tel est le plan des élites triomphantes. Vous croirez sauver vos descendants, mais vous assurerez leur sujétion au salariat, régime qui a mené l’espèce au bord du suicide. Vous croirez faire des sacrifices pour la Vie et pour la Planète, mais vous nourrirez Moloch. Alors qu’ils iront travailler en bicyclette, vos petits-enfants, par leurs impôts et par leurs achats, financeront la jet society, « carbon dioxyde authorized », des héritiers de Monsieur Hulot et ses soutiens.

Les élections sont libres. Elles ne présagent aucune réelle mise en question tant que les dominés font leurs les règles de la domination. Ainsi règne la servitude volontaire, énoncée en 1549 par un Étienne de la Boétie âgé de dix-huit ans (8). Presque cinq siècles plus tard, vous lui promettez, chers admirateurs de Nicolas Hulot, une gloire éternelle.

 

 
(1) http://www.pacte-ecologique-2007.org
(2) L’IEESDS est l’Institut d’études économiques et sociales pour la décroissance soutenable, et le numéro 1 de son bulletin est offert en supplément à « La Décroissance » du 22 novembre 2006 (en kiosque). On peut lire l’article de Sophie Divry sur http://www.decroissance.org/index.p…
(3) Archive payante sur le site du Monde : http://www.lemonde.fr/cgi-bin/ACHAT… , archive gratuite sur le site de l’Humanité : http://www.humanite.fr/journal/2002…
(4) Martine Bulard, « L’Inde reprend son rang », Le Monde Diplomatique, janvier 2007, page 11
(5) Allocution d’ouverture du secrétaire général des Nations-Unies au Sommet alimentaire mondial, Rome, 10 juin 2002, http://www.unhchr.ch/huricane/huric…
(6) Prix Nobel d’économie, ancien conseiller du président Clinton et ancien vice-président de la Banque Mondiale, Joseph Stiglitz est devenu un pourfendeur de la pensée économique dominante – http://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph…
(7) http://www.espacesdialogues.org/pdf/Derriere_la_fatalite_epuration_sociale_art_ignorer_les_pauvres.pdf. Pour aller plus loin, on fera son miel du testament de ce grand économiste, père du concept de technostructure, et disparu en avril 2006 à l’âge de 97 ans : Les Mensonges de l’économie, Grasset 2002, 92 pages, 9 €.
(8) Discours de la servitude volontaire, texte complet sur www.forget-me.net et résumé sur www.fr.wikipedia.org .Extrait : « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. »

« Témoignage », de Nicolas Sarkozy, est en France le best-seller de l’été

(Première mise en ligne sur http://www.fairelejour.org)

 

La France est le seul pays où les citoyens s’opposent en nombre à la guerre sociale que pouvoirs petits et grands mènent aujourd’hui dans l’Union européenne et au-delà. Elle est le pays d’Europe où les marchands de canons et les entreprises de travaux publics, qui vivent des commandes de l’État, sont propriétaires de la presse. Elle est ce pays où un prix Nobel, François Mauriac, taxait la droite, bien qu’il en fût, de plus bête du monde. Et où d’insurpassables philistins, de Balladur à Raffarin, après Debré père, ont tenu à en administrer la preuve. Elle est un pays où le président traîne des dossiers judiciaires que seuls l’influence, les privilèges et l’immunité de sa charge ont tenus à distance.

Dans cette France où, omniprésents sur la scène du spectacle, des intellectuels à paillettes, présentés comme des esprits libres et décapants (1), veillent aux éternels intérêts de la domination, où les gouvernants qui s’affirment de gauche ont assuré le triomphe de la finance et de la réalité, avant de perdre des élections où ils n’avaient pas craint de dire que leur programme n’était pas socialiste, dans cette France de notre coeur et de nos irritations, où la démocratie abandonne assez d’effrayés, de perdus et d’exclus pour remplir les rangs de l’extrême-recul…

Dans cette France, un petit-fils de l’émigration hongroise, maire d’une commune des beaux quartiers de la capitale, revendique publiquement d’avoir forgé son caractère au feu des humiliations de l’enfance.

C’est, presque soixante-dix ans après Sartre, L’enfance d’un chef au pays de la télévision triomphante.

Évidemment qu’il fascine ! Il a le profil de ces rêves dont aucun de nous n’est indemne, que chacun d’entre nous s’est vu proposer dans sa plus ou moins tendre jeunesse. La figure du héros, gagnant à toutes les courses. Chaque effort écarte un rival. Chaque pas devance un concurrent. La moindre parole efface un doute. À chaque discours s’offre une salle. Un rêve entretenu par une large part du cinéma mondial, et par le petit écran.

Par chance, la vie nous a donné les corrections, les correctifs, et avec quelques gifles la réalité nous a humanisés.

Nicolas Sarkozy, pour son malheur intime, n’a rien appris. Il est voué à l’« hybris », l’excès, la démesure, faute occidentale s’il en est, le seul « péché » que les Grecs anciens reconnaissaient, celui de contrevenir aux lois ultimes qui s’imposent même aux dieux.

Il est un parfait président de fin du monde, impavide, surtout impavide, fût-il publiquement convaincu de bassesse, de brutalité, de tromperie ou d’avoir été trompé. Un président se répandant aux microphones à toute heure, devant les caméras de même, sautant d’un avion à une limousine et d’un hors-bord à un quatre fois quatre. Infatigablement il distribue le bâton et la carotte, édicte les règles de conduite, donne les bons et les mauvais points. Et suprême atout, autant pour représenter nos rêves que pour s’assurer un monopole, cet homme s’est déjà présenté devant son camp en disant « Voici le traître ! ». On en déduit qu’au besoin il est prêt à retourner sa veste, et le revendiquera.

« Les Français » peuvent bien en faire un succès de librairie pour l’été ! Au moins, c’est Dallas en librairie et pas à la télévision, quoique ce soit triste pour maint auteur estimable. Mais voudraient-ils de ces lecteurs-là ? Il y a Français et Français, l’histoire n’est pas terminée.

 

(1) 6 ans plus tard: voir ce qu’en dit Pascal Boniface dans son tonifiant Les intellectuels faussaires – le triomphe médiatique des experts en mensonge. (Vidéo ici, article ailleurs.)

 

De quoi débattent les socialistes ?

La synthèse d’Henri Weber dans Le Monde (« De quoi débattent les socialistes ? » 17.11.05) est remarquable de bonnes intentions et affligeante dans ses propositions.

Cette espèce de fuite en avant dans les grands travaux et chantiers d’avenir, outre qu’elle ouvre des perspectives réjouissantes à de grandes entreprises inciviques, se complaît à  répéter paresseusement les recettes d’un passé idéalisé. Henri Weber néglige totalement la remise en cause du partage de la prospérité caractéristique de notre époque, à savoir :

- un protectionnisme d’État offert mondialement à la finance mondialisée,

- pour les marchés financiers, une « assurance-vie » contre toute inflation représentée par l’imposition d’un chômage massif et durable.

Sur notre continent, c’est la Banque Centrale Européenne qui s’en charge. Son autonomie est totale par rapport aux gouvernements et au suffrage universel ! Et la mission qu’elle poursuit sans faiblesse est la lutte contre l’inflation, au mépris de tout autre objectif. Autrement dit, juguler l’inflation, obsession du rentier, est une tâche qui est assurée dans une absolue priorité, la conséquence en étant ce « taux de chômage d’équilibre » dont n’hésitent pas à parler les économistes, et qu’ils chiffrent autour de 9 %. Pas plus qu’ils ne craignent de faire du taux d’emploi une « variable d’ajustement ». En clair, les travailleurs
paieront par le chômage la prospérité des secteurs protégés, la finance essentiellement.

(Exemple : « Il faut savoir que le pire ennemi des profits, c’est le plein emploi, or on est loin du plein emploi. » nous rappelle François Chevalier, stratégiste chez VP Finances http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=737)

Il est impensable et pourtant quotidien que des « socialistes » passent cette question sous silence ! Face à cette véritable guerre sociale, que nous propose Henri Weber, député européen ?

1) « Le premier volet de ce projet est consacré à l’instauration progressive d’une autre mondialisation et d’une meilleure « gouvernance » internationale. … Dans la hiérarchie des normes internationales, les socialistes entendent faire prévaloir la sécurité sanitaire, les droits élémentaires des travailleurs, la préservation de l’écosystème, la diversité culturelle sur les exigences du libre commerce. » Début d’un catalogue où je ne vois aucun levier, aucun point d’appui.
« Des avancées importantes sont réalisables : l’Union européenne a obtenu que la culture, l’éducation, la santé soient soustraites des négociations sur la libéralisation des services à l’OMC et, par 151 voix contre 2, la Convention de l’Unesco sur la diversité culturelle a affirmé le droit de chaque nation de soutenir sa création et son identité culturelles. » Avancées ou ligne de défense ? Rien ici sur la finance, quelques lances rompues contre « l’hyper-puissance américaine ».

2) La suite : « Le deuxième volet du projet socialiste concerne la réorientation de la construction européenne dans le sens d’une Europe plus volontaire, plus sociale, plus démocratique. Par-delà leurs divergences d’appréciation sur la Constitution de Bruxelles, les socialistes partagent une même conception de l’Europe qu’il faut construire : tous sont pour une Europe-puissance, capable de défendre les conquêtes sociales acquises par les salariés au cours de deux siècles de lutte, un modèle de civilisation humaniste, qui laisse une large part aux rapports non marchands ; une Europe capable de peser sur l’organisation du monde multipolaire et hautement conflictuel dans lequel nous sommes entrés. » Construire une « Europe-puissance », capable de « défendre les conquêtes sociales », on y revient : du défensif, du défensif, dans un torrent de bonnes intentions : « volontaire », « plus sociale », « plus démocratique », « civilisation humaniste », « rapports non marchands ». Les rentiers jusqu’ici ne craignent toujours rien.
95 % des transactions quotidiennes sont financières, 5 % correspondent à des échanges réels.

3) Avançons. « Le troisième volet de ce projet socialiste a trait à la définition du compromis social-démocrate de ce début de siècle. La grande majorité des socialistes français récuse la voie sociale-libérale préconisée par le New Labour de Tony Blair. »
C’est bien la moindre des choses. « La motion des « blairistes » français n’a recueilli que 1 % des voix. » Espérons ! « Elle [la grande majorité des socialistes français] récuse également la crispation conservatrice sur le modèle social-démocrate du siècle dernier frappé d’obsolescence par la mondialisation et la financiarisation du capitalisme. » Toujours rien sur une alter-financiarisation.
Vient ensuite l’apologie d’un « modèle », argumentation bientôt obsolète faisant en général l’impasse sur les conditions locales inexportables du supposé « modèle ». « Les solutions mises en oeuvre par les sociaux-démocrates des pays scandinaves trouvent davantage de grâce aux yeux des socialistes français. Ceux-ci veulent, eux aussi, rénover profondément le compromis social-démocrate des « trente glorieuses », mais en en conservant l’esprit et les principes : économie mixte (c’est-à-dire économie de marché régulée par la puissance publique et corrigée par l’intervention des partenaires sociaux) ; Etat social actif, disposant de services publics diversifiés et garantissant à tous une protection sociale de qualité. Démocratie sociale, reposant sur des droits sociaux étendus reconnus aux salariés et le développement des négociations collectives. Écodéveloppement, recherchant une croissance respectueuse de l’environnement et des intérêts des générations futures. » La Bourse tremble.

L’audace : « Concrètement, les trois principales motions socialistes préconisent une même politique de reconquête du plein-emploi. » Personne n’y croit, et personne n’en parle plus, du plein-emploi. Henri Weber me paraît ici se payer de mots.
Pourtant, quand il aborde le seul point, à mes yeux, où un véritable argument de reconquête pourrait être défini, il n’en fait rien : « Celle-ci s’inspire, sans la répéter, de la politique mise en oeuvre avec succès entre 1997 et 2002 et qui a contribué à créer 2 millions d’emplois supplémentaires dans notre pays. Cette politique combine des mesures conjoncturelles incitatives (relance de la demande par la hausse du pouvoir d’achat des salariés,…), une politique macroéconomique volontariste et des réformes de structure à moyen terme (recherche, enseignement supérieur, formation continue) favorisant une meilleure spécialisation de notre économie dans les industries de pointe et les services à haute valeur ajoutée. »

La seule avancée de l’emploi a été marquée par les 35 heures, et c’est à juste titre que la droite en a fait ce que l’on sait. La réduction du temps de travail, avec le maintien du salaire bien entendu, sans quoi le terme est usurpé, correspond à un partage des gains de productivité, et a été la seule voie, avec la hausse des salaires réels, impensable avant résorption du chômage, d’amélioration du sort des travailleurs depuis un siècle. Un débat qui semble clos pour Henri Weber. Il est vrai que la France a fait cavalier seul sur ce front et que depuis les syndicats allemands ont accepté dans la peur une augmentation sans hausse de salaire de près de dix pour cent de la durée hebdomadaire du travail pour des millions de salariés !

Cette impasse nous ramène à ce que les marxistes d’un temps passé auraient appelé la « contradiction principale » du capitalisme actuel : la domination mondiale du capital financier sur les autres.

4) « S’agissant de la réforme de l’État, enfin – quatrième volet du projet socialiste -, nous convergeons sur la nécessaire modernisation démocratique de nos institutions ; tous les socialistes veulent renforcer le pouvoir des assemblées élues, et en premier lieu celui du Parlement, tous veulent développer la démocratie participative et la politique contractuelle. Tous sont d’accord aussi pour rénover les services publics et lutter contre l’instauration de “l’État providence résiduel” qu’appellent de leurs voeux les conservateurs libéraux.
Le nouvel âge du capitalisme appelle un nouvel âge de la social-démocratie. Celle-ci sera altermondialiste, altereuropéenne, féministe et social-écologiste. Derrière chacun de ces termes se trouve un programme d’action. C’est de son contenu que débattent les socialistes français et européens. Il serait dommage que la compétition – légitime – des meilleurs d’entre eux pour la magistrature suprême rende cette controverse inaudible. »

Le progrès social semble à lire ces lignes un pur objet de langage ! Je n’y trouve que des affirmations générales et bien-pensantes, l’évitement complet des sujets sensibles susceptibles de nous éclairer (voyez le succès fulgurant et rassembleur d’Attac), et l’approche d’aucun moyen d’action.

C’est dramatique. Dans ces conditions, l’appel à une convergence « altermondialiste, altereuropéenne, féministe et social-écologiste » relève d’un véritable racolage.

Les liens dans une citation 1/1/2001

Bonjour Maxime,

Voici, dans la citation, un lien sur « Origine bio certifiée » et un autre sur « Semences reproductibles » juste après « L4211S ».
À part l’invisibilité de l’article publié, l’éditeur de texte sous l’onglet « visuel » ne donne pas non plus le wysiwyg. Mais ça, je peux faire avec.
Passer le pointeur de souris sur le texte absent.

Semences reproductibles
Variété traditionnelle du Pays Basque. Fruit rouge foncé, long, mince, piquant. Très fort.
Date de semis ou de plantation :
Référence : L4211S
Origine bio certifiée
Semences reproductibles
Type de sol                                drainé et humifère
Situation                                    ensoleillée
Espacement                               50×50 cm
Date de semis ou de plantation février-mars
Date de récolte                          juillet-octobre
Densité de semis                        1gr/10m²
Rendement en kg                      1.5 – 2kg/plante
Culture en pot                            oui