La transition écologique, telle que proposée par les instances officielles, est impossible et n’aura pas lieu

 

Bonjour !

 

Cette vidéo présente un extraordinaire entretien avec Aurore Stephant, ingénieure géologue minière, spécialisée dans les risques environnementaux et sanitaires des filières minérales, sur la chaîne Thinkerview.

À voir et écouter absolument si on ne veut pas mourir idiot, ce qu’en principe nous préférons, puisqu’il faut mourir.

Aurore Stephant, qui rit beaucoup « pour ne pas pleurer » ajoute-t-elle, est un puits de science dans son domaine, les activités minières, leurs techniques et leurs effets, environnementaux, économiques, sanitaires et sociaux, en particulier les métaux. Elle cite au débotté les dates, titres et auteurs des études sur lesquelles elle appuie chacun de ses dires.

Elle analyse les programmes de réduction des gaz effets de serre issus des accords de Paris, des gouvernements américain ou allemand, des Nations-Unies.

Les besoins en métaux qu’impliquent ces programmes d’énergie « propre » sont gigantesques et impliquent une multiplication de l’extraction par deux à dix-sept, selon les métaux,. Or il faut quinze ans pour extraire le premier minerai, à partir du moment où on envisage le projet: études de faisabilité et de rentabilité, sondages du site, obtention des autorisations, aménagement des infrastructures nécessaires en routes et en énergie, voire portuaires.

Les programmes ambitieux de « transition », annoncés comme nécessaires (à la différence des mesures affichées et prises par les Etats et par les entreprises), sont donc tout simplement impossibles. Par ailleurs, s’ils étaient réalisés, des études montrent que leur coût climatique dépasserait les effets que l’on veut éviter.

Et dernière chose: le passage à la voiture électrique représente ou représenterait de 50 à 60 % des besoins en métaux de la dite transition. (« Il n’est pas né celui qui me fera acheter une voiture électrique! » s’écrie notre ingénieure.) Le deuxième poste le plus gros consommateur de ces ressources réside dans l’extension nécessaire des réseaux électriques.

Par ailleurs les activités minières ont un impact environnemental, sanitaire et social gigantesque. En particulier, les mines qui cessent d’être rentables sont abandonnées sans plus, avec dans le meilleur des cas, et dans une proportion d’entre elles inférieure à cinq pour-cent, une « réhabilitation » des sites dont des études montrent qu’il s’agit en réalité d’une invisibilisation.

Je laisse à votre curiosité le soin de découvrir tout ce qu’Aurore Stephant nous dit d’autre. Sauf juste ceci: les scientifiques ont beaucoup espéré d’un découplage attendu, ou rêvé, entre le besoin en extraction de métaux et une poursuite de la croissance exprimée en PIB. C’était bien un rêve, car la réalité montre qu’il faut de plus en plus de métaux par point de PIB supplémentaire.
Au lieu d’un découplage, il y a eu une intensification de la part des métaux dans chaque point de PIB supplémentaire.

 

Commentaire personnel: il n’y a rien à attendre des programmes de réduction des gaz à effet de serre tant qu’ils s’associent à la croissance du produit intérieur brut et au maintien d’un mode de vie et de consommation inchangé.

Alors faites un exercice. Coupez la télé et faites-vous une soirée devant l’écran avec cet entretien qui dure en effet trois heures. Cela vaut largement une soirée à thème sur Arte.

La bonne nouvelle, c’est que moins d’une heure suffit amplement pour comprendre.

 

8 réflexions au sujet de « La transition écologique, telle que proposée par les instances officielles, est impossible et n’aura pas lieu »

  • 6 mars 2023 à 13h26
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    Bonjour
    Vous faites bien de mettre cette vidéo en évidence, je l’ai déjà regardé plusieurs fois.
    Je suis d’accord avec votre analyse tout en étant convaincu que les émissions de gaz à effet de serre ne sont qu’un problème marginal.
    Il nous faut une vision globale et ces deux vidéos en lien nous en donnes un aperçu.
    Le problème principal est la déshydratation des continents par l’usage que nous en faisons, déforestation, agriculture, urbanisation.
    Une fois ce problème résolu, celui des émissions de GES aura tout naturellement ses solutions, l’inverse étant impossible.
    https://www.youtube.com/watch?v=5eM92J9nKB4 de 27 min à 48 min.
    https://www.youtube.com/watch?v=G-2hVeUAOms

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    • 6 mars 2023 à 13h59
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      Bonjour,
      Merci pour votre commentaire, mais vous me paraissez bien optimiste.
      Je ne suis pas sûr que chercher un problème principal unique soit très productif, c’est même le contraire d’une vision globale que vous appelez de vos voeux. Ce qui est intéressant, c’est que dans toutes les difficultés qui existent à nous sortir de ce très mauvais pas, on retombe toujours sur l’obligation de toucher au mode de vie et de croissance, et ça, c’est soit le silence, soit la guerre contre les discours critiques.

      Il y a un bouquet d’impasses qui peuvent paraître partiellement indépendantes mais qui signent un tableau systémique d’ensemble. La raréfaction des ressources est une évidence, des énergies fossiles au sable et à quantité d’autres, le billet ici présentant l’impact actuel et envisagé dans le futur sur les seules activités minières métalliques.
      Des scientifiques ont défini 9 limites vitales, dont 6 seraient dépassées, les dépassements représentant quasiment des points de non-retour à moyen terme. Et certains veulent y ajouter la pollution généralisée par les PFAS, polluants indestructibles en milieu naturel.

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      • 6 mars 2023 à 21h06
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        Je suis parfaitement en accord avec le lien que vous avez proposé et je sais qu’on va vers la fin des ressources mais le problème immédiat sont les extrêmes climatiques.
        Il y a une chute dramatique de la pluviométrie qui, de plus, est en croissance exponentielle.
        Je ne souhaite pas du mal à quiconque mais il y aura des millions de morts bien avant que les matières premières ne s’épuisent si nous ne voulons pas comprendre le sens du fonctionnement de la biosphère.
        Nous allons dans le sens contraire de son fonctionnement.
        Ces problèmes n’auront pas des conséquences dans des décennies, c’est maintenant que ça se passe.
        Si la sécheresse (ou l’inondation) qui s’annonce a la même importance que celle de 2022 on est mal.

        Dans l’ordre voici ce qu’il serait indispensable d’entreprendre
        1/ retenir par tous les moyens l’eau sur les continents pour qu’elle s’infiltre.
        2/ Recycler l’eau des villes
        3/Cesser de travailler les sols dans l’agriculture.
        4/Végétaliser le maximum

        Comment y arriver sur le plan socio-économique je n’en sais rien, mais ce qui est sûr c’est quand le robinet fera pchiiit on viendra trouver les gens qui s’occupent de l’eau pour connaître ce qu’il y a lieu de faire.

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      • 7 mars 2023 à 11h59
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        Bonjour,

        Dans mon commntaire, mon intention n’est pas de mettre en évidence un problème principal et unique, bien sûr que tous les problèmes sont interconnectés, mais de mettre en évidence l’urgence du rétablissement des cycles de l’eau. Voici un document récent qui en parle. https://interculturelles.org/wp-content/uploads/2022/07/Comprendre-les-cycles-hydrologiques-et-cultiver-l-eau-v1-WEB.pdf?fbclid=IwAR0aaXQoe3NnZAkQq3hrIPHuhTMDIfL4ntkPQ4nqPhjPlDgvZUW4NZKQhHw

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  • 6 mars 2023 à 12h55
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    Bonjour Guy, on me racontait l’autre jour une conversation entendue dans un bus. Une dame enceinte – dont l’élocution suggérait qu’elle était relativement éduquée – racontait à une autre qu’elle mangeait sucré pour avoir une fille. Si quelqu’un lui avait fait remarquer que le sexe des enfants est déterminé une fois pour toutes à leur conception, il y a fort à parier que la réaction de la dame aurait été « Je le sais! Ne me prenez pas pour une débile. »

    Ce que disent Stéphant, Bihouix, Jancovici, Fressoz, et plein d’autres à propos de la transition, beaucoup de gens le savent.

    Je travaille dans un département universitaire de recherche en ingénierie. Depuis quelques mois, l’argent public coule à flot sur quiconque joue le jeu de la transition. L’hydrogène, les batteries, la capture du CO2, l’économie circulaire, les analyses de cycle de vie… Tout y passe.

    Quand l’occasion s’en présente, je rappelle à ces gens (parmi les plus éduqués du coin) que les gadgets sur lesquels ils travaillent sont sans commune mesure avec l’ampleur du problème qu’ils croient résoudre. Souvent ça se passe comme ça.
    « – Un seul chiffre: un Européen moyen a besoin de 6kW pour vivre.
    – 6 kW pendant combien de temps?
    – Un Watt est une puissance, 6 kW ça veut dire 6 kilojoules à chaque seconde qui passe.
    – Je sais ce qu’est une puissance! (ne me prends pas pour un(e) débile). »
    Évidemment qu’ils/elles le savent, et tout le problème est là. Ces gens manipulent des chiffres par jeu. Pour obtenir des subsides, pour montrer que ce qu’ils/elles font est important, etc. Rien de plus.

    Pour revenir à nos moutons, notre problème principal n’est pas le changement climatique. C’est l’épuisement à court terme des ressources qui sont consubstantielles à la civilisation. D’après un rapport de l’IEA, le pic mondial d’extraction du pétrole conventionnel a été dépassé en 2008. Tiens, tiens… Et un rapport récent du Shift Project prédit que la production de pétrole (y compris non-conventionnel) de la dizaine de pays qui fournissent plus de 90% du pétrole de l’UE va décroitre de plus de 20% durant la décennie 2030.

    Ces 6kW par personne sont notre consommation d’énergie primaire (parfois c’est exprimé en PJ/an ou Mtep/an, mais c’est le même chiffre). Ca inclut la nourriture, les soins de santé, toute la mécanisation qui libère du temps et permet d’aller à l’école, etc. La part de l’électricité c’est 1kW par personne. Et le nucléaire qui semble intéresser tant de gens, ce n’est que la moitié de ce sixième.

    Si on voulait fournir 6 kW sans énergie fossile (pas par choix, mais parce qu’on va le subir) il faudrait soit 120 esclaves, soit 200m2 de panneaux solaires par personne. Et la deuxième option suppose que le stockage de l’électricité ne pose soudainement plus de problème, que les ressources métalliques soient disponibles, etc. Et accessoirement qu’on sache fabriquer des panneaux solaires sans pétrole.

    On peut faire le même raisonnement avec les éoliennes, ou toute autre alternative aux énergies fossiles. Et le coup des esclaves (à 50 W chacun), ce n’est qu’une demi-blague, parce que ça donne une mesure de la durée des bouleversements sociaux qui vont accompagner tout ça.

    La question que je me pose n’est pas de savoir si tout ça va se déliter dans les prochaines décennies, mais si les vrais décideurs mondiaux l’ont déjà assimilé. Et si BlackRock spécule déjà à la baisse sur l’effondrement de l’Europe. Ou s’ils attendent l’argent des prochains fonds de pension français pour le faire.

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    • 6 mars 2023 à 13h46
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      Merci!
      J’hallucine aussi à voir des gens instruits consommer SUV, avion, et tout ce qui est dans « leurs moyens » sans vergogne, et qui ne sont même pas arrosés par les financements de la « transition ».
      Pour les vrais décideurs mondiaux, je ne sais que penser. Les plus lucides doivent se dire qu’ils ont les moyens d’être parmi les derniers qui souffriront, mais ils risquent d’être simplement les derniers à mourir, si on regarde par exemple la fin de la civilisation des Vikings du Groenland, qui était une société très hiérarchisée (dans « Effondrement » de Jared Diamond).
      Je ne vois pas que l’on puisse éviter un chaos gigantesque, et quelques milliards de morts. Si on remplace « la fin de l’espèce humaine est possible », assez fréquemment lu et entendu finalement, par « il pourrait y avoir plusieurs milliards de morts dans la population humaine », ça change un peu l’écho intérieur, non?

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      • 6 mars 2023 à 18h04
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        Peut-être. Mais même dans la perspective de plusieurs milliards de morts, je crois que beaucoup d’Européens vont se dire jusqu’au bout que ce ne sera pas eux et/ou leurs enfants qui en souffriront dans leur chair.

        Un autre truc qu’on entend beaucoup, c’est « on trouvera bien une solution ».

        L’image de Jared Diamond qui me vient en tête est celle des chefs de l’Ile de Paques donnant l’ordre de couper les derniers arbres. Au nom de la croissance économique sans doute. Après ça ils n’ont même plus été capables de pêcher, faute de bateaux.

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        • 7 mars 2023 à 2h42
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          Bien d’accord avec vos deux premiers paragraphes : la cécité individuelle semble avoir été une constante dans les effondrements civilisationnels qui sont globaux ou collectifs.

          Pour ce qui est de l’île de Pâques, j’aurais tendance à penser que le dernier arbre abattu de l’île n’a été que le dernier geste d’une société en perdition, dont les auteurs ou commanditaires n’avaient pas conscience de leur fin comme nous pouvons la considérer quelques siècles plus tard…

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