Les lendemains du 5 décembre – Libre et provisoire synthèse sur le projet macronique de réforme des retraites

 

(Texte écrit les 6-8 décembre)

Bonjour !

Les événements se précipitant, je me suis documenté sur la réforme des retraites que veut imposer Emmanuel Macron. Je livre ici une synthèse provisoire sur la question, que j’appelle « libre » en ce sens que je ne vais pas appuyer dans le texte chacun de mes dires par un lien. Je puise notamment dans des médias sur abonnement, Là-bas si j’y suis, Mediapart, Arrêt sur Images, qui tous mettent néanmoins, notez-le, certains textes ou émissions en accès libre. Je donne en vrac quelques sources parfois référencées au bas de ce billet.
…C’est un destin incontournable, pour les Belges francophones, que de suivre de près ou de trop près l’état de notre voisin du sud. Et non sans raisons. Pour le mouvement social comme pour le nucléaire et d’autres sujets et pratiques, nous sommes sous influence.

Répartition ou capitalisation Lire la suite

La cohérence et les tartuferies d’Emmanuel Macron selon Romaric Godin

La Guerre sociale en France – Aux sources économiques de la démocratie autoritaire (éd. La Découverte, 245 pages, 18 euros) est le dernier livre de Romaric Godin, journaliste actuellement chez Mediapart, lequel y consacre un large article (ici en PDF).

Romaric Godin étudie un peu finement la position de Macron, avec sa cohérence et sa « tartuferie », qui repose essentiellement sur des axiomes assumés comme non critiquables. C’est donc par la critique des axiomes, comme pour un paranoïaque et comme pour la « science » économique universitaire dite néo-classique, qu’on peut échapper à sa logique. Par exemple, le mantra macronien « progressisme » consiste à favoriser la possibilité de chacun …de se vendre au mieux sur le marché du travail.
Entre parenthèses, Macron a été co-rédacteur du rapport Attali, ce faiseur de rois campant complètement sur une même ligne du « tout ou rien ».

Macron se dit progressiste.
Quel est donc le progressisme de ce « réformateur » qui a donné le titre « Révolution » à son livre d’entrée en politique?
Voici ce qu’en dit Romaric :

Le progressisme se veut social parce qu’il entend donner à ceux qui ne les ont pas les moyens de venir sur le marché du travail, là où le capitalisme manchestérien ne se souciait pas de la capacité des hommes à se vendre. Il les prenait comme ils étaient, pour ce qu’ils étaient. Ici, le « progressisme » ne cesse de parler d’humain, parce qu’il entend donner à chacun cette capacité à se vendre. Il y a cette idée que l’on peut en permanence améliorer sa compétitivité individuelle et mieux réussir sur le marché. Le libéralisme d’antan laissait l’individu se débrouiller avec ce qu’il avait, le néolibéralisme veut améliorer la capacité marchande de chacun. La compétition n’en est pas moins féroce, et le résultat pas forcément différent.
Cette action se fait, d’abord, par une logique de workfare : l’État doit assurer à chacun des revenus minimum permettant de se présenter sur le marché du travail. Mais il ne peut le faire que si ces revenus sont effectivement utilisés pour aller sur le marché du travail. Autrement, il s’agirait d’une rente. Le soutien contre la pauvreté n’est donc pas un humanisme, c’est un soutien au marché qui est conditionné à la participation de l’individu a ce dernier. Deuxième moyen, la formation et l’éducation, qui doivent assurer la capacité marchande permanente de l’individu sur le marché du travail et permettre une adaptation de l’individu aux demandes du marché. Dernier moyen, la lutte contre les discriminations, qui n’est cependant pas une spécificité de ce « progressisme ». Là encore, il ne s’agit pas d’un quelconque humanisme mais d’une logique de marché : toute discrimination est une rente parce qu’elle favorise un acteur de marché plutôt qu’un autre sur des critères non économiques. Mais c’est souvent une tartuferie car les discriminations, raciales et sexuelles, s’enracinent aussi dans des déterminations économiques. L’illégalité formelle de la discrimination ne dit rien des différences sociales qui, souvent, aggravent les discriminations existantes. Si les personnes d’origine étrangère sont moins bien formées en raison des capacités économiques de départ de leur famille, elles seront toujours proportionnellement moins nombreuses à réussir. Surtout si les protections sociales sont affaiblies et renforcent encore les inégalités sociales de départ. Mais, comme la réussite n’est qu’individuelle, ces circonstances sont largement niées. La lutte contre les discriminations est donc un paravent de la libéralisation. On constate, du reste, que ce « progressisme » n’est largement que de façade, la politique migratoire d’Emmanuel Macron étant très peu ouverte et centrée sur les besoins du marché.
(…)
À noter : le progressisme ne discute pas, ou à la marge, le résultat de la loi du marché, puisqu’il estime que la redistribution est trop forte. Toutes les inégalités issues de la justice du marché sont acceptables. Le travail, produit du marché, est un « vecteur de mobilité sociale et d’émancipation » et ceux qui veulent vivre mieux doivent donc mieux répondre aux demandes du marché. C’est là une responsabilité individuelle. Grâce au marché, le progressisme remplace la redistribution par des droits.

Quelques remarques sur le revenu universel

thinkerview.com (1 heure 29 minutes)

Bonjour!

Le revenu universel, dit aussi allocation universelle ou revenu de base, qui serait octroyé inconditionnellement à tout·e citoyen·ne, indépendamment de toute activité, toute autre rémunération ou toute condition de patrimoine, est un sujet qui traverse toutes les orientations politiques. On le voit défendu de la gauche de gauche à l’extrême-droite, ce qui donne à méditer…
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Entre Gérard Noiriel et Pascal Bruckner, le gouffre des positions de classe

Une histoire populaire de la France – De la guerre de Cent Ans à nos jours – Voir la présentation de l’éditeur

 

 

Gérard Noiriel est avec Frédéric Lordon un des rares intellectuels ayant refusé l’invitation de Macron à une soixantaine d’entre eux. Dominique Méda, qui espérait faire entendre sa voix, a dit sa profonde déception.

C’est un spectacle consternant de voir et entendre à cette réunion, pompeusement baptisée « Grand débat des idées », Pascal Bruckner révéler sa morgue indépassable. Comment une position de classe peut aveugler face à l’histoire et faire méconnaître absolument la souffrance sociale:

 

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1933: Citroen, le bordel capitaliste, dit par Jacques Prévert

André Citroën perdit des millions au casino et licencia tous les ouvriers des quais de Javel (là où se situait sa plus grosse entreprise)        (histoiresordinaires.fr)

On avait vu en 1925 une publicité lumineuse pour Citroën prendre toute la hauteur de la tour Eiffel. Elle est évoquée dans le texte. Les millions joués aux casinos aussi. Les réductions de salaire de même. Lire la suite

Bonne bonne année année 2019 2019 !

Fresque murale du graffeur Blu, Berlin-Kreuzberg, 2008

 

En ville.

– Ah, bonjour toi!
– Oui, bonjour!
– Tout va bien?
– Pas mal, pas mal, on se plaint pas, on se plaint pas.
– Tu parles pour deux? …Pour ta compagne aussi?
– Non. Je répète ce que j’aime dire ou proférer.
– Ha ha. …Proférer est un terme biblique, divin, blasphématoire.
– Logique parfaite. Lire la suite

Mathilde Larrère à propos des gilets jaunes

https://www.arretsurimages.net/chroniques/arrets-sur-histoire

 

Bonjour!

 

Spécialisée dans l’étude des mouvements sociaux (plus précisément les révolutions françaises du XIXe siècle), maîtresse de conférence à l’université, Mathilde Larrère est l’historien(ne) la plus intéressante que je connaisse dans les médias. Elle tient une chronique dans arretsurimages.net où elle intervient régulièrement. Lire la suite

Les bullshit jobs ou « boulots à la con » de David Graeber, par Yusul

 

Ha ha!
Et bonjour!

Cela faisait longtemps que je voulais ici présenter le brûlot de David Graeber, auteur de l’expression « les 1 % » lors du mouvement Occupy Wall Street, et de la monumentale Dette – 5.000 ans d’histoire.

Son Bullshit jobs a d’abord été un petit article, une parenthèse. Mais elle a fait le tour du monde, et du coup David a étoffé le propos. Il en a fait un petit livre. Lire la suite

Sophie a aujourd’hui cinquante ans, comme Mai 68

 

Pour Sophie, contractuelle depuis près de vingt ans dans l’Éducation nationale payée au Smic, ça ne fait aucun doute : « Macron veut nous faire la peau. Il s’attaque à tout le monde, les étudiants, les cheminots, les fonctionnaires, les retraités, les chômeurs, pendant que le CAC 40 engrange encore plus de bénéfices. » Elle ajoute : « Je vais avoir 50 ans le 25 mars. Je suis née trois jours après le début de Mai 68. J’espère que le mouvement va prendre. Il le faut absolument. »

Mediapart 23 mars 2018, reportage à la manifestation de la veille contre la réforme de la Sncf et la dégradation des services publics.

 

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Note: le mouvement français dit « mai 68 » a en effet commencé le 22 mars, mais uniquement pour sa moitié étudiante. Cet événement a aussi été un vaste mouvement ouvrier et salarié, un des plus massifs du XXème siècle. Qui en parle?