Il faut soutenir Mediapart, et la façon de le faire, c’est de s’y abonner. C’est un soutien, certes, mais – vous commencez à le subodorer -, c’est avant tout une formidable source d’information indépendante, sans publicité, et sans milliardaire ni groupe industriel parmi les actionnaires. Les infos pour l’abonnement sont ici: 9 euros par mois.
9 euros par mois, c’est le prix de 4 exemplaires-papier du Monde (à condition de ne pas l’acheter le week-end), de 4 ou 5 exemplaires de Libération ou du Figaro, selon qu’on les achète en France ou en Belgique. Ces trois journaux appartiennent à des milliardaires. L’Humanité aussi, journal du parti communiste français, a eu besoin d’un milliardaire pour éviter la faillite.
Quant à la presse quotidienne belge, désolé, je n’ai pas les détails. Il est assez évident que pas un titre belge ne sort du rang des « mainstream » (« eau tiède »), et qu’aucun n’est libre de la toute-puissance des annonceurs… est un fait avéré.
Comme le disait un proverbe ouvrier du début du XXème siècle: « N’achète pas le journal, tu ramènerais un patron à la maison » .
Les fleurs vénéneuses du socialisme de gouvernement à la française …continuent d’embaumer, et d’animer les amateurs de parfums plus délicats.
1.
Pour le philosophe italien Giorgio Agamben, l’état d’urgence n’est pas une protection de la démocratie, mais au contraire accompagne en général les dictatures.
Il a longuement étudié le nazisme et le fascisme italien, et vient de consacrer un livre à la Stasi, la police politique de l’Allemagne de l’Est.
Son article « De l’Etat de droit à l’Etat de sécurité », dans Le Monde, a fait du bruit, et je le joins en PDF.
Agamben dit que le peuple, prétendument seule source de légitimité jusqu’à présent, devient, dans la logique de ce qu’il faut reconnaître comme une progression vers l’État de sécurité, un sujet dépolitisé qui n’existe plus que dans les sondages et dans les rares consultations électorales. Au bout de ce chemin, le peuple ne peut plus être politique que dans une revendication identitaire du « nous » opposé à l’étranger et à l’ennemi.
Agamben ajoute que la mise entre parenthèses du pouvoir judiciaire tend à abandonner les voies de vérité et de preuve ordinaires au profit d’une incertitude du soupçon, qui pèse autant sur les citoyens (Qui est coupable et de quoi ?) que sur la menace elle-même, laquelle devient une source invérifiable du pouvoir des exécutifs.
Car dans cette configuration comme dans toute autre, les pouvoirs ont intérêt à cultiver le montage qui leur assure une place. Et ils ne s’en privent pas!
Vous aurez remarqué comme moi que François Hollande, discrédité par son absence totale d’alternance et allant à la bérézina et à la ‘pasokisation’ de son parti, se refaisait précocement une santé sondagière par des postures militaristes à l’étranger, qui lui vont comme un gant de crin à un pingouin. Aujourd’hui, il poursuit dans cette ligne en surfant sur la vague terroriste. C’est la seule possibilité de survivre politiquement que se sont trouvée les élites de ce parti.
L’avenir est radieux.
Bientôt, nous éviterons les voyages en France comme nous les avons évités en Espagne du temps de Franco. Certains de mes amis évitent déjà la Provence.
2.
Ces fleurs vénéneuses, le maire d’extrême-droite de Béziers, Robert Ménard, champion de l’enfumage et des faux semblants, est ravi de les respirer.
Voici ce qu’il a « tweeté » le 23 décembre:
3.
Manuel Valls déclare au JDD : « Une partie de la gauche s’égare au nom de grandes valeurs » .
Mais où va-t-il chercher ses certitudes? C’est hallucinant.
Hallucinant en première réaction, car éthiquement incompréhensible pour les naïfs et les braves gens, le Manuel de Matignon est, au vrai, conceptuellement très simple et simplet. C’est la logique des « pompeux cornichons » qui veulent le pouvoir. Lisez donc, si vous l’avez zappé, Agamben au point 1. Pour la cornichonnerie pompeuse, qui est un label belge offert à la terre entière, voyez votre moteur de recherches.
Bref, La Parisienne libérée chante « Enfin débarrassés du socialisme » . (Voir point 5.)
4.
Le Français Mourad Benchellali est décrit par la journaliste comme « militant anti-radicalisation ».
Cet ancien combattant en Afghanistan, ex-détenu à Guantanamo, vit aujourd’hui, pacifié et engagé, dans son quartier d’origine près de Lyon, Les Minguettes à Venissieux.
Il a été l’invité d’Alexandra Bensaid sur France-Inter, pour aborder la question de la constitutionnalisation de l’état d’urgence et la déchéance de la nationalité.
…Il me semble que si la république française n’est pas capable d’entendre ce genre de voix-là, elle s’autodétruira, comme le susurre, encore elle, La Parisienne libérée. (Ci-dessous.)
Pour le moment, je suppose, et j’espère, que Benchellali trouve une manière ou l’autre de vivre sur un budget de la jeunesse, de la culture ou de l’éducation populaire, ce qui est ou serait très bien. À préserver!
5.
La Parisienne libérée et ses vidéos, c’est tout un monde décalé et percutant de « Rythm and News » et de chansons politiques, depuis quelques années déjà.
Son JT a été initié et se poursuit avec le soutien de Mediapart. Ici son édition spéciale, « Etat d’urgence »:
Entre autres perles: « Le terrorisme ne détruira pas la république, car c’est la république qui s’auto-détruira », et « L’homme providentiel assigné à présidence » .
Chaque mot compte, avec La Parisienne libérée. Elle me rappelle Woody Guthrie qui écrivait sur ses guitares: This Machine Kills Fascists (« Cette machine tue des fascistes »)
Une phrase violente, certes, mais en paroles et en musique ! On a vu pire, comme violence.
6.
Pierre Rosanvallon :
Est-ce une immigration mal maîtrisée qui a contribué à déstabiliser le fragile pacte républicain ? En France, on continue à parler d’immigrés à propos de personnes qui sont intégrées depuis deux ou trois générations. On ne dirait pourtant jamais de Nicolas Sarkozy qu’il est immigré parce que son père est issu de la petite noblesse hongroise. Ni de Manuel Valls dont le père était un peintre catalan. (…) Car si l’Algérie n’est pas devenue française ce n’est pas simplement du fait de la révolte des Algériens, mais aussi parce que les autorités rêvaient et mentaient. Elles parlaient d’universalisme mais refusaient l’égalisation des niveaux de vie. Il y a donc eu une désoccidentalisation de ces populations à la mesure des déceptions et des échecs qui se sont répétés sur le terrain de l’intégration.
7.
** Mon observation se confirme, que le journal Le Monde, qui s’est notablement droitisé en matières économique et sociale ces dernières années, est monté au créneau d’une certaine veille démocrate dans notre affaire.
J’ai vu, en revanche, un titre de presse selon lequel Valls et Hollande feraient un malheur parmi les lecteurs du Figaro. Quelqu’un a-t-il des observations?
8.
On arrive à la fin. Désolé (c’est pas vrai) pour la longueur !
…Et bonne journée !
Guy
9. Post-scriptum de saison, pour le repos de l’esprit
J’aime les raisins glacés parce qu’ils n’ont pas de goût,
les hommes riches parce qu’ils n’ont pas de cœur
et les camélias parce qu’ils n’ont pas de parfum.
Marguerite Gautier, dans La Dame aux camélias, d’Alexandre Dumas fils
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Crédit bibliographique : Maxime alias Jean-Marie Lamy.
L’Arabie saoudite est courtisée par l’Occident. On le sait, et ça ne date pas d’hier.
Hier justement, le ministre-président wallon socialiste, Paul Magnette, justifiait les ventes d’armes de guerre wallonnes à ce pays, par un bla-bla à prétention géopolitique et dans une posture de responsabilité des « engagements internationaux » , comprenons les compromissions, de la Belgique. Çuilà, il ne connait l’internationalisme que dans les livres d’histoire. Et du commerce, il connaît d’abord le déni.
Le wahhabisme est la version bien cadenassée de l’islam à la saoudienne. Wahhabisme notre ami? Pas le mien, mais alors, wahhabisme leur ami?
Lorsque le roi Abdallah est mort, en janvier 2015, quelques jours après les attentats à Charlie-Hebdo, le roi Philippe de Belgique s’est rendu aux obsèques du monarque défunt d’un régime qui interdit aux femmes de conduire une voiture, exécute de façon sanglante plus d’une centaine de condamnés par an, et au même moment condamnait le blogueur Raif Badawi à dix ans de prison et mille coups de fouet pour avoir animé un site internet consacré à la liberté d’expression. François Hollande aussi était de la partie aux funérailles, et pas mal d’autres démocrates. Récemment l’inénarrable Manuel Valls est allé écrire une ligne de son CV là-bas, à l’occasion de la signature de contrats portant sur dix milliards d’achats militaires divers par Ryad à l’industrie française. Il a tweeté victorieusement un message supprimé depuis lors, mais pérennisé par Serge Halimi dans Le Monde diplomatique. C’est bien, Twitter: « France-Arabie saoudite : 10 milliards d’euros de contrats ! Le gouvernement mobilisé pour nos entreprises et l’emploi. »Lire la suite
– Salut, Rrrr. Tout va bien?
– Ça va ça va. Enfin, il me semble. Aussi bien que possible, les choses étant ce qu’elles sont.
– Tu as vu ce texte d’un Américain, qui dit dans un journal de New York que la France est le pays au monde où il fait le meilleur vivre?
– Oui, j’ai lu.
– On peut boire du vin ou de l’alcool en France, croire en Dieu ou pas, tromper sa femme sans courir d’opprobre, et on dispose là-bas d’écoles gratuites.
– Oui, j’ai lu ça. Pourtant, les riches Français s’installent à Bruxelles.
– Oui, à Molenbeek.
– Hi hi. Et les étudiants français fuient en nombre l’école française gratuite, …pour l’école belge.
« La France incarne tout ce que les fanatiques religieux ont toujours haï : la jouissance de la vie sur Terre d’une myriade de façons : une tasse de café parfumé et un croissant au beurre le matin, de belles femmes habillées en robes courtes qui sourient librement dans la rue, l’odeur du pain chaud, une bouteille de vin partagée entre amis, une touche de parfum, les enfants qui jouent au Jardin du Luxembourg, le droit de ne croire en aucun Dieu, de ne pas se soucier des calories, de flirter et fumer et de faire l’amour en dehors du mariage, de prendre des vacances, de lire ce qu’on veut, d’aller gratuitement à l’école, de jouer, rire, argumenter, de se moquer des prélats et des politiciens, de ne pas se soucier de la vie après la mort.
Aucun pays ne profite autant de la vie que les Français. Paris, nous t’aimons. Nous pleurons pour toi. Tu es en deuil ce soir, et nous sommes à tes côtés. Nous savons que tu riras à nouveau un jour, tu chanteras, tu feras l’amour et tu guériras, parce que l’amour de la vie est ton essence. Les forces du mal vont reculer. Elles vont perdre. Elles perdent toujours ».
On se doute que la réponse est « non ». Romaric nous explique comment Merkel aurait lâché la bride à Schäuble pour faire peur au gouvernement Tsipras, tétanisé à l’idée de quitter la zone euro. Car si le « grexit » est de longue date la préférence du bundes-ministre des finances, les aléas de l’aventure font reculer les plus prudents, dont la chancelière.
Pour rappel, à partir du moment où Tsipras, abusé, a cru que l’eurozone était prête à l’exclure des bénéfices du fétiche monétaire unioniste, à partir de ce moment, il était cuit. Il a tout accepté pour rester dans l’euro, et Angela n’avait plus qu’à faire son business as usual, faire accepter au Bundesrat l’accord imposé à Tsipras.
La chancelière aurait joué Schäuble dans sa stratégie personnelle contre la Grèce. Romaric Godin montre qu’aussi acharnés soient certains gouvernements (Finlande, Slovaquie, pays baltes) sur la ligne Schäuble, c’est l’Allemagne qu’ils suivent et si Angela Merkel impose un aménagement, personne ne proteste parmi ces héros.
Cependant la France est sortie du bois tout à la fin, au moment de la défaite de Tsipras, tentant de faire valoir qu’elle aurait une position indépendante de Berlin, voire même conflictuelle, et que ce serait la France qui aurait empêché Schäuble et sa bande d’exclure la Grèce de l’euro – alors que c’est Angela qui a fait ça. La France de Hollande-BNP-Paribas n’a en réalité pas cessé de laisser les coudées franches à Deutschland GmbH*, dans la crise grecque, et depuis plus longtemps même, et en retour la chancelière laisse Hollande et son ministre des finances Sapin faire leur numéro devant les micros. Je vous renvoie à l’article pour les détails, très instructifs, et pour la vue d’ensemble, très convaincante.
*
La comédie en place permet à Hollande de prétendre « équilibrer » le rapport avec l’Allemagne, voire de s’y opposer. Lire la suite
Frédéric Lordon vient de s’exprimer dans son blog, pour la première fois depuis l’accord arraché à Alexis Tsipras.
En préambule, une première lecture me paraît cependant parfaitement à propos et, même, indispensable.
Matt O’Brien, dans son blog hébergé par le Washington Post, nous dit, sous le titre « The euro is a disaster even for the countries that do everything right » , comment deux pays gouvernés par des intégristes de l’Euroland, la Finlande et les Pays-Bas, ont réussi à se retrouver en 2014 avec un PIB inférieur de 5,1 et 0,3% à celui de 2007, avant l’effondrement financier de 2008.
Sur la même période, l’Islande (dont j’ai déjà parlé ici), qui a connu une dépréciation monétaire allant jusqu’à 60 pour-cent, des mesures d’austérité draconiennes, doubles des néerlandaises et de douze fois celles de la Finlande, se retrouve avec un PIB supérieur de 1,14 point à 2007. La raison de ces différences? Appartenir ou pas à la zone euro. L’article est en anglais (merci de me signaler une traduction française), court et clair: http://www.washingtonpost.com/blogs/wonkblog/wp/2015/07/17/the-euro-is-a-disaster-even-for-the-countries-that-do-everything-right/?tid=sm_tw
Venons-en maintenant à la prose annoncée: « La gauche et l’euro : liquider, reconstruire ».
Je fais un résumé par extraits qui me paraissent significatifs ou plaisants.
Les citations qui suivent sont dans l’ordre où elles apparaissent dans l’article. Si l’une ou l’autre fait problème pour le lecteur, ou l’intéresse particulièrement, il lui suffira d’aller au texte de Frédéric, où elle est déployée et mise en contexte. Idem pour la lectrice.
…Attachez-vous!
questionner le rapport de la société allemande à la chose monétaire n’est pas plus germanophobe que questionner le rapport de la société américaine aux armes à feu n’est américanophobe
On reconnaît l’indigence d’une pensée à son incapacité à traiter aucun problème autrement que dans des coordonnées morales.
formulations néo-éclairées d’une naïveté touchante : l’Allemagne est « le nouveau problème de l’Europe », écrit ainsi François Bonnet [Mediapart]. Le nouveau problème… C’est juste le problème constitutionnel de la monnaie unique, et il est consigné depuis 1991 dans le texte des traités.
Tous les pays vivent avec les obsessions de leur roman national, c’est bien leur droit, en tout cas à court et même moyen terme il n’y a rien à y faire.
il faut redire que l’Allemagne dans cette affaire n’a jamais poursuivi de projet positif de domination, et que ses comportements n’ont jamais été gouvernés que par la peur panique de souffrir, dans le partage communautaire, l’altération de principes qui lui sont plus chers que toutLire la suite
La désignation de Pierre Moscovici en tant que commissaire européen par un pouvoir français peu connu à Bruxelles pour être exemplaire en matière de respect des règles budgétaires, auxquelles la France officielle souscrit par ailleurs fermement, nous avait déjà donné un remarquable numéro de danse du ventre du candidat. Sous le feu des critiques et questions des intégristes du marché qui s’en donnaient à coeur joie, Moscovici s’était engagé sans convaincre. Mais soit, il avait formellement déclaré ce qu’il était sensé déclarer, et depuis lors il a donné toute satisfaction, notamment en se livrant à d’impudentes exhortations de rigueur envers le gouvernement grec, qui lui coûteront très cher au Walhalla du socialisme (s’il existe).
Le propos est ici celui de sa rémunération, qu’il « n’assume pas », titre Le Monde, alors qu’elle est publique. Lire la suite
32.000 personnes perdent leur allocation de chômage le premier janvier. Soit elles vont relever de l’aide sociale, soit elles devront, si elles cohabitent, se débrouiller avec le seul salaire du ou de la cohabitant-e.
Il est évident que ces gens ont commis des actes qui méritent une punition !
Il paraît que les premiers de classe qui nous gouvernent savent que cette mesure est un gage de jours meilleurs pour tous. Moi, pauvre idiot, qui suis un premier de classe défroqué, je ne les crois pas!
– Euh, vous dites?
– …
– Que la « droite complexée », comme Frédéric Lordon appelle le PS, était au pouvoir quand la mesure a été prise? Lire la suite
La FACIR, Fédération des Auteurs Compositeurs & interprètes Réunis (prononcez « Fakir ») , lutte contre la réforme du statut des artistes.
Cette réforme fort décriée est une réalisation fédérale, dans laquelle a trempé, une fois de plus, l’élite du socialisme de gestion et de gouvernement. Entre fidélité au pouvoir nourricier, et respect de son électorat, il faut choisir!
Voyez ci-dessus la vidéo #3 de la FACIR, qui vaut bien ses deux minutes.
Et voici qu’en soutien à cette lutte, notre vénérable et toujours facétieux Julos Baucarne n’hésite pas à abandonner son idiome natal pour nous parler, enfin en anglais, de son pays, l’Absurdistan. [Post-scriptum: il faut voir et revoir cette petite merveille !!!!]
Bientôt la rentrée!
N’hésitez pas, vous, pour suivre cette charmante affaire, à visiter le site http://www.facir.be.