Frédéric Lordon après l’accord arraché à Tsipras: « Lexit ! »

( Photo Martin Leissl / Bloomberg )
( Photo Martin Leissl / Bloomberg )

Bonjour!

Frédéric Lordon vient de s’exprimer dans son blog, pour la première fois depuis l’accord arraché à Alexis Tsipras.

En préambule, une première lecture me paraît cependant parfaitement à propos et, même, indispensable.

Matt O’Brien, dans son blog hébergé par le Washington Post, nous dit, sous le titre « The euro is a disaster even for the countries that do everything right » , comment deux pays gouvernés par des intégristes de l’Euroland, la Finlande et les Pays-Bas, ont réussi à se retrouver en 2014 avec un PIB inférieur de 5,1 et 0,3% à celui de 2007, avant l’effondrement financier de 2008.
Sur la même période, l’Islande (dont j’ai déjà parlé ici), qui a connu une dépréciation monétaire allant jusqu’à 60 pour-cent, des mesures d’austérité draconiennes, doubles des néerlandaises et de douze fois celles de la Finlande, se retrouve avec un PIB supérieur de 1,14 point à 2007. La raison de ces différences? Appartenir ou pas à la zone euro. L’article est en anglais (merci de me signaler une traduction française), court et clair:
http://www.washingtonpost.com/blogs/wonkblog/wp/2015/07/17/the-euro-is-a-disaster-even-for-the-countries-that-do-everything-right/?tid=sm_tw

Venons-en maintenant à la prose annoncée: « La gauche et l’euro : liquider, reconstruire ».

Je fais un résumé par extraits qui me paraissent significatifs ou plaisants.

Les citations qui suivent sont dans l’ordre où elles apparaissent dans l’article. Si l’une ou l’autre fait problème pour le lecteur, ou l’intéresse particulièrement, il lui suffira d’aller au texte de Frédéric, où elle est déployée et mise en contexte. Idem pour la lectrice.

…Attachez-vous!

questionner le rapport de la société allemande à la chose monétaire n’est pas plus germanophobe que questionner le rapport de la société américaine aux armes à feu n’est américanophobe

 On reconnaît l’indigence d’une pensée à son incapacité à traiter aucun problème autrement que dans des coordonnées morales.

 formulations néo-éclairées d’une naïveté touchante : l’Allemagne est « le nouveau problème de l’Europe », écrit ainsi François Bonnet [Mediapart]. Le nouveau problème… C’est juste le problème constitutionnel de la monnaie unique, et il est consigné depuis 1991 dans le texte des traités.

 Tous les pays vivent avec les obsessions de leur roman national, c’est bien leur droit, en tout cas à court et même moyen terme il n’y a rien à y faire.   

 il faut redire que l’Allemagne dans cette affaire n’a jamais poursuivi de projet positif de domination, et que ses comportements n’ont jamais été gouvernés que par la peur panique de souffrir, dans le partage communautaire, l’altération de principes qui lui sont plus chers que tout Lire la suite

À chaud

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Internet. Le genre d’images que suscite l’action des (ir)responsables de l’UE

Bonjour!

Wolfgang Schäuble a raté ses tentatives réitérées de pousser la Grèce à la sortie. C’est une victoire du mythe de l’euro dans l’opinion grecque. – Et aussi du recul devant un inconnu redoutable, malgré l’exemple trop peu diffusé de l’Islande.

Tout le reste est sinistre. Est-ce que la scène grecque va encore nous surprendre? Elle a fait des choses extraordinaires et totalement imprévues.

Eric Toussaint pense que le gouvernement Tsipras aurait dû menacer de suspendre le paiement de la dette unilatéralement. Mais il n’y avait pas de soldats pour cette campagne-là. D’accord avec lui qu’ « une restructuration conditionnée par des mesures néo-libérales est un mauvais accord. »

L’UE écoeure même les fonctionnaires européens, dit Le Monde.

Je pense comme d’autres que l’Union commence sa chute. Le roi est nu. L’Union Européenne n’est pas le culte de la paix. Sa désUnion a commencé, et la propagande de guerre de la Bild Zeitung et consorts ne la sauvera pas.

Par ailleurs, le monde, même stupéfait, ne s’arrête pas de tourner.

L’Espagne vote en novembre.

La bulle de la finance globalisée, de cinq fois le PIB mondial, ne peut qu’exploser prochainement. Dans les quatre ans, selon Gaël Giraud. De cela aussi, les intégristes du marché qui gouvernent l’UE ont peur. Ils ont craint que la Grèce ne soit le premier domino, et la peur a nourri leur haine de gens qui n’ont jamais prévu de s’entendre dire non.

Prosit !

Guy

Post scriptum
L’image ci-dessus est plus un symptôme qu’une vérité.
L’UE, soi-disant garante de la paix sur notre continent, nourrit ce genre de productions.
C’est la guerre par d’autres moyens, et c’est terrible.
En faire une opposition entre nations est une confusion et une arnaque. Il y a des « fascistes en col blanc », les économistes ultra-libéraux et leurs maîtres, dans tous les pays!
Une UE qui a la responsabilité de construire pour la paix, le prétend et s’en vante, ne devrait pas donner le flanc à ces critiques. Et encore moins sous cette forme-là. Sa faillite commence.

SCHÄUBLEXIT !!!

Post-scriptum:
Wolfgang Schäuble, né en 1942, serait à la place d’Angela Merkel (1954) s’il n’avait été compromis dans le scandale et les procès des financements illégaux de la CDU, dans les années 1990 sous le mandat du chancelier Kohl.
Il y eut, outre d’autres versements occultes, les commissions versées par un marchand d’armes, Karlheinz Schreiber: 1.000.000 de DM au trésorier de la CDU, pour le compte de Thyssen, et 100.000 DM à Schäuble.
Ce dernier a été condamné pour parjure devant la justice, et Schreiber lui a remboursé l’amende.
La CDU a dû renoncer à Wolfgang Schäuble comme successeur de Kohl à la présidence du parti, qui a été remise en 2000 à la jeune Angela Merkel, alors âgée de 46 ans.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_des_caisses_noires_de_la_CDU

latribune.fr , excellent sur la Grèce et les questions connexes

alexis-tsipras-par-Yannis_BEHRAKIS
latribune.fr, photo de Yannis BERHAKIS

Bonjour!

latribune.fr est une des meilleures sources d’information sur la Grèce et les questions connexes, oui, grâce à son journaliste Romaric Godin qui, en tant qu’ancien correspondant à Francfort, ne rate rien dans la presse de langue allemande.

La faillite de la banque autrichienne Hypo Alpe Adria avait déjà mis en péril tout le secteur hypothécaire allemand, qui pèse 400 milliards, pour une misérable participation de 2 ou 300 millions à son capital mettant en danger une petite banque hypothécaire de Düsseldorf au bilan d’une dizaine de milliards. La Bundesbank était intervenue massivement à toute vitesse, en recommandant « Circulez, il n’y a rien à voir », et la presse a bien fait le boulot ou plutôt le non-boulot. François Leclerc avait pu dire que « les banques européennes sont sous perfusion », un constat à ne pas oublier!
Les effets de cette faillite se poursuivent:
http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/et-pendant-ce-temps-l-autriche-restructure-sa-dette-491019.html
http://www.latribune.fr/actualites/economie/union-europeenne/20150311trib06be01e69/l-autriche-menacee-du-defaut-d-un-de-ses-lander.html

Le tout dans une Autriche qui… Lire la suite

Quel optimisme après la victoire du « non » en Grèce ?

SolutionMoreGreekDebt
International Herald Tribune, avec l’autorisation de © Chappatte, www.globecartoon.com

Bonjour !

 

La Grèce n’est certainement pas sortie de graves difficultés.

Mais le résultat de ce référendum va contribuer à la montée de la contestation dans l’Union européenne, une perspective qui a très certainement fondé l’engagement pour le « oui » d’une série de personnalités européennes, lesquelles se révèlent avoir raté une grande occasion de se taire. Bravo!
La contestation est en marche, et elle paraît aussi inévitable que nécessaire.

Avec ça, une course de fait est engagée entre deux camps.
Il y a la contestation crispée sur les fondamentaux du conservatisme et les fausses évidences du bon sens, qui se prétend anti-système mais en cas de succès mènera inévitablement à un accord avec le grand capital, pour qui « à droite rien n’a jamais été trop à droite« , rappelle Frédéric Lordon. Le FN français en est un représentant éminent, qui se félicite de la victoire du « non » grec.
Et il y a une contestation à visée égalitariste, qui récuse l’inégalité et la domination de l’économie et de la finance, et une fois au pouvoir pourrait trouver légitime d’exproprier les « un pour-cent ». Ceux-ci le savent et tiennent fermement les rênes de leurs journaux! Lire la suite

GR – 5 ! Juncker, Sakellaridis, Stiglitz, Krugman

A protester holds a sign reading "No" in Greek and French during a rally in support of Greece in Paris on June 28, 2015. Greece weighed drastic banking restrictions to stave off a financial collapse as anxious Greeks emptied cash machines amid fears that banks will be closed this week. AFP PHOTO / LOIC VENANCE
Paris, 28 juin 2015. AFP PHOTO / LOIC VENANCE

Bonjour!

Nous sommes dans une semaine grecque, à n’en pas douter, et un moment historique.

1. Juncker

Le Nouvel Obs écrit que Jean-Claude Juncker « peine à masquer sa désillusion » .
C’est bizarre, moi je suppose de la comédie.
Que notre commissaire en chef marque le coup, c’est sûr, et qu’il « peine à masquer », d’accord, mais il veut masquer quoi?
J’entends du paternalisme.
Des notions de morale sont énoncées.
Le grand mot d’Angela Merkel est brandi, le « travail ». (Ailleurs dans de nombreuses interviews, il parle de « jeu », comme Donald Tusk et d’autres.) « Ayant beaucoup travaillé », Juncker dit se sentir « trahi ».
Il le dit.

Il énonçait il y a quelques semaines qu’ « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens. » Il l’a dit. Et ça n’est pas près de quitter sa biographie. Une des phrases qui précédaient cet aveu historique, c’était: « Dire que tout va changer parce qu’il y a un nouveau gouvernement à Athènes, c’est prendre ses désirs pour des réalités. »

Ici, en son for intérieur, il fait de son mieux pour « communiquer » un texte soigneusement revu par ses assistants aux dents longues et aux lourds diplômes.
Mais là n’est pas le problème.
Le problème, c’est que ce type est au service de l’Allemagne de Merkel et des banques de partout, et que comme premier ministre il a organisé une évasion fiscale au détriment des pays voisins, au profit de son grand-duché natal et des multinationales impériales. Les gouvernants des pays spoliés, dont le mien, ne lui en veulent pas, et laissent courir.
Je n’appellerais pas ça une union européenne.
Lui, et eux, si. Lire la suite

La rémunération mensuelle d’un commissaire européen

 

Moscovici

Les données en PDF

 

Bonjour !

La désignation de Pierre Moscovici en tant que commissaire européen par un pouvoir français peu connu à Bruxelles pour être exemplaire en matière de respect des règles budgétaires, auxquelles la France officielle souscrit par ailleurs fermement, nous avait déjà donné un remarquable numéro de danse du ventre du candidat. Sous le feu des critiques et questions des intégristes du marché qui s’en donnaient à coeur joie, Moscovici s’était engagé sans convaincre. Mais soit, il avait formellement déclaré ce qu’il était sensé déclarer, et depuis lors il a donné toute satisfaction, notamment en se livrant à d’impudentes exhortations de rigueur envers le gouvernement grec, qui lui coûteront très cher au Walhalla du socialisme (s’il existe).

Le propos est ici celui de sa rémunération, qu’il « n’assume pas », titre Le Monde, alors qu’elle est publique. Lire la suite

Erri De Luca: Notre mer qui n’es pas aux cieux, prière laïque

Erri_De_Luca__pecheurs&migrantsBonjour!

 

Voici Mare nostro, une prière laïque d’Erri De Luca.
Elle se trouve sur son site, avec une traduction anglaise : Mare Nostro Our Father Sea, et il l’a prononcée à la télévision, à l’émission Piazzapulita (« un coup de balai ») de la chaîne La7 Attualità, le 19 avril, au lendemain de la mort en Méditerranée de plus de 800 migrants.
Ci-dessous, avec une traduction établie d’après celle d’Eugénio Populin, parue sur son blog Mediapart, et celle d’Olivier Favier sur son site Dormira jamais.

Mare nostro che non sei nei cieli e abbracci i confini dell’isola e del mondo,sia benedetto il tuo sale,

sia benedetto il tuo fondale.

Accogli le gremite imbarcazioni

senza una strada sopra le tue onde,

i pescatori usciti nella notte,

le loro reti tra le tue creature,

che tornano al mattino con la pesca

dei naufraghi salvati.

 

Mare nostro che non sei nei cieli,

all’alba sei colore del frumento,

al tramonto dell’uva di vendemmia,

ti abbiamo seminato di annegati

più di qualunque età delle tempeste.

 

Mare nostro che non sei nei cieli

tu sei più giusto della terraferma,

pure quando sollevi onde a muraglia

poi le abbassi a tappeto.

Custodisci le vite, le visite cadute

come foglie sul viale,

fai da autunno per loro,

da carezza, da abbraccio e bacio in fronte

di madre e padre prima di partire.

;

 Notre mer qui n’es pas aux cieux et embrasses les frontières de l’île et du monde,que ton sel soit béni,

que ton fond soit béni.

Accueille les embarcations bondées

sans aucune route sur tes vagues,

les pêcheurs sortis dans la nuit,

leurs filets parmi tes créatures,

qui rentrent au matin avec leur pêche

de naufragés sauvés.

 

Notre mer qui n’es pas aux cieux

à l’aube tu es couleur de blé,

au couchant du raisin des vendanges,

nous t’avons semée de noyés

plus que n’importe quel âge des tempêtes.

 

Notre mer qui n’es pas aux cieux

tu es plus juste que la terre ferme,

même quand tu soulèves des murs de vagues

puis les abats en tapis.

Préserve les vies, les visites tombées

comme des feuilles sur l’allée,

sois-leur un automne,

une caresse, une embrassade et un baiser sur le front,

de père et mère avant de partir.

Grèce, les 3 premières mesures de Syriza

VAROUFAKIS-le-minotaure-planetaire
Éditions du Cercle, décembre 2014

Bonjour!

La politique à contrecœur, c’est ainsi que cela devrait être.

En « vraie » démocratie, la politique ne serait pas un métier, mais un devoir, et se porter à tout prix candidat d’élection en élection serait un motif d’être écarté.

Voici un entretien vidéo en anglais (5:14), avec sa transcription en français,
de l’économiste Yanis Varoufakis, donné comme futur ministre des finances de Syriza:
http://questionscritiques.free.fr/edito/interview_Yanis_Varoufakis_Paul_Mason_Syriza_230115.htm 
Lire la suite