Les vœux de la présidente Océanerosemarie pour 2016

 


Bonjour!

La vidéo ci-dessus (Youtube) est extraite d’un article de Mediapart en accès gratuit: https://www.mediapart.fr/journal/france/311215/les-voeux-de-paix-d-oceanerosemarie

Il faut soutenir Mediapart, et la façon de le faire, c’est de s’y abonner. C’est un soutien, certes, mais – vous commencez à le subodorer -, c’est avant tout une formidable source d’information indépendante, sans publicité, et sans milliardaire ni groupe industriel parmi les actionnaires. Les infos pour l’abonnement sont ici: 9 euros par mois.

9 euros par mois, c’est le prix de 4 exemplaires-papier du Monde (à condition de ne pas l’acheter le week-end), de 4 ou 5 exemplaires de Libération ou du Figaro, selon qu’on les achète en France ou en Belgique. Ces trois journaux appartiennent à des milliardaires. L’Humanité aussi, journal du parti communiste français, a eu besoin d’un milliardaire pour éviter la faillite.
Quant à la presse quotidienne belge, désolé, je n’ai pas les détails. Il est assez évident que pas un titre belge ne sort du rang des « mainstream » (« eau tiède »), et qu’aucun n’est libre de la toute-puissance des annonceurs… est un fait avéré.

Comme le disait un proverbe ouvrier du début du XXème siècle: « N’achète pas le journal, tu ramènerais un patron à la maison » .

Encore les robots. La peur des robots

 

Bonjour!

Robot est un mot qui nous vient du tchèque « robota ».
Le terme signifie « travail, besogne, corvée ». Paré d’un exotisme en noir et blanc qui est celui de Kafka et du Golem, il porte son lot de fantasmagories inquiétantes.
Qu’y a-t-il en français pour le dire autrement? Automate, déjà utilisé au XVIIIème siècle, qui ferait se dégonfler bien des soufflés, est interdit.

Dans la vidéo ci-dessus figure un robot japonais très habile au iaijutsu, un des arts traditionnels du sabre nippon.
On y voit que les lames des sabres sont damassées ! L’acier damassé aussi, comme l’art du samouraï, a demandé quelques siècles de méditation.

robot japonais 3

La grande inquiétude, ou la grande anticipation, est aujourd’hui, dans certains milieux par ailleurs ou prétendument éclairés, qu’un jour les robots seront autonomes et se passeront de nous, les humains.

Un scientifique américain a même nommé ce moment. Lire la suite

Le bel avenir promis à l’eurozone et à l’UE

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Comme le disait déjà La Boétie****, ils sont en réalité tout petits! – Wergosum, d’après une photo Reuters dans latribune.fr

Bonjour!

Romaric Godin nous a livré une fois de plus un excellent article sur le site latribune.fr, sous le titre « Grèce : y a-t-il un vrai désaccord entre Paris et Berlin ?  »

On se doute que la réponse est « non ». Romaric nous explique comment Merkel aurait lâché la bride à Schäuble pour faire peur au gouvernement Tsipras, tétanisé à l’idée de quitter la zone euro. Car si le « grexit » est de longue date la préférence du bundes-ministre des finances, les aléas de l’aventure font reculer les plus prudents, dont la chancelière.

Pour rappel, à partir du moment où Tsipras, abusé, a cru que l’eurozone était prête à l’exclure des bénéfices du fétiche monétaire unioniste, à partir de ce moment, il était cuit. Il a tout accepté pour rester dans l’euro, et Angela n’avait plus qu’à faire son business as usual, faire accepter au Bundesrat l’accord imposé à Tsipras.

La chancelière aurait joué Schäuble dans sa stratégie personnelle contre la Grèce. Romaric Godin montre qu’aussi acharnés soient certains gouvernements (Finlande, Slovaquie, pays baltes) sur la ligne Schäuble, c’est l’Allemagne qu’ils suivent et si Angela Merkel impose un aménagement, personne ne proteste parmi ces héros.

Cependant la France est sortie du bois tout à la fin, au moment de la défaite de Tsipras, tentant de faire valoir qu’elle aurait une position indépendante de Berlin, voire même conflictuelle, et que ce serait la France qui aurait empêché Schäuble et sa bande d’exclure la Grèce de l’euro – alors que c’est Angela qui a fait ça. La France de Hollande-BNP-Paribas n’a en réalité pas cessé de laisser les coudées franches à Deutschland GmbH*, dans la crise grecque, et depuis plus longtemps même, et en retour la chancelière laisse Hollande et son ministre des finances Sapin faire leur numéro devant les micros. Je vous renvoie à l’article pour les détails, très instructifs, et pour la vue d’ensemble, très convaincante.

*

La comédie en place permet à Hollande de prétendre « équilibrer » le rapport avec l’Allemagne, voire de s’y opposer. Lire la suite

« Burnoutte », de l’anglo-américain burn-out, subst. masc., lecture provisoire

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Théodore Géricault, L’Aliéné

L’expression « burn-out » a tout du langage des motoristes et des artificiers. Elle indique l’épuisement complet du carburant. La fusée ou le pétard ont fait long feu.
Voilà un premier point.
Cet anglicisme recouvre un état proche de la notion psychologique plus ancienne de « décompensation » : épuisement, perte de repères, perte même du sens de l’identité. Pendant quelques jours le burn‑outé ou la burn‑outée ne savent plus vraiment qui ils sont.
Or voici que le burn-out a cessé d’être rare ou anglophone. Abandonnons les guillemets et les italiques, car chacun connaît désormais, et dans sa langue !, un cas de burn-out ou deux, rien n’indiquant la fin prochaine de cette extension du domaine de la chute.
Comme je suis fier de parler l’idiome dans lequel je suis tombé à la naissance, ce qui ne me donne aucun droit et n’a rien à voir avec la raison d’état, qu’elle soit de Hollanboma ou de Merkeloutine, comme je suis fier que 20.000 personnes au monde parlent le routoul
J’écris ton nom, burnoutte.
Le burnoutte.

Essayons une lecture provisoire.
Le burnoutte résulterait de deux réalités.

D’abord, il y la pression sur les travailleurs de tout niveau.
Par­ leur mise en concurrence, par les modes d’évaluation permanente et chiffrée, le ranking, par la modélisation des objectifs et des performances, par la normalisation des « compétences » qui exclut toute notion de savoir ou de savoir-faire (exclusion merveilleuse aussi dans le domaine des formations). Il y a tout ce processus, devenu omniprésent dans le monde du travail salarié, qu’Alain Supiot dissèque magistralement dans son livre L’esprit de Philadelphie.
Supiot nous dit que nous sommes passés du gouvernement par des lois à l’administration des choses. Les salariés de tout niveau sont traités comme des choses (et pas dans leur seule dimension de salariés !), et nous en sommes arrivés au « marché total » (d’autres parlent de la « marchandisation » de tous les aspects de la vie humaine et naturelle), dont le germe éclot d’après lui dès la campagne de Verdun. Du droit, il a une conception idéaliste et irénique (« qui croit en la paix universelle » ) qui me laisse sur ma faim, mais son analyse de l’évolution de la législation et des relations du travail me paraît tenir du scalpel autant que de l’orfèvrerie.

Deuxièmement.
Pour que les salariés en arrivent au burnoutte, qui signifie que l’effort porté contre soi-même a dépassé une limite très haute de dangerosité, il faut aussi que les enrichisseurs d’employeurs estiment ne pas pouvoir se soustraire à l’exigence qui leur est faite. Lire la suite

Royaume-Uni: Salauds de pauvres !

 

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Fois quinze, en quatre ans!
Le graphique ci-dessus, riche promesse d’avenir, nous est donné dans un article du Monde du 7 avril, intitulé « Malgré la reprise économique, le Royaume-Uni touché par la faim ».

On se demande bien ce que reprise économique veut dire quand on voit ces chiffres! La langue journalistique ou économique est un mystère.

Pour faire bref, voici trois sous-titres de ce texte: « Sans revenus du jour au lendemain », Au moins 2 millions de Britanniques mal nourris, et Une politique « punitive » dirigée  « contre les pauvres », sous lequel nous lisons:

l’invraisemblable augmentation de la pauvreté Outre-Manche depuis quelques mois trouve aussi ses origines dans le « Welfare Reform Act 2012 », la réforme d’ampleur de la protection sociale initiée par le gouvernement conservateur de David Cameron. Le journaliste et économiste Stewart Lansley, coauteur d’un essai intitulé Breadline Britain: the Rise of Mass Poverty (« La Grande-Bretagne sous le seuil de pauvreté : la montée de la pauvreté de masse ») évoque une politique « punitive » dirigée « contre les pauvres, et non contre la pauvreté »

David Cameron? Ah oui, ce jeune homme de bonne famille! Le pote de notre premier ministre, lui aussi fils de!
Ils sont en avance sur nous, les Britanniques, et ils en ont fait du chemin, depuis Margaret Thatcher. Lire la suite

Groogle for ever, cherchez l’erreur

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En kiosque, Trends-Tendances du 27 novembre 2014 – Photo G. L.

Bonjour!

 Faut-il être sémiologue ou spécialiste du langage des signes, doté d’un talent de traducteur de la pierre de Rosette, pour décoder cette couverture?

Tout d’un coup, la presse du capital nous dit que les gens qui travaillent « doivent travailler ». Ah! Ils doivent, les pauvres? N’ai-je pas mille fois entendu qu’ils le choisissaient, de travailler ou pas? Eh bien, la presse de l’entreprise peut le dire, qu’ils doivent travailler, et elle le dit! …Mais uniquement dans l’hypothèse où ils ne devraient plus le faire.
…Glâce à Groogle! Lire la suite

« L’Allemagne s’est créé un avantage compétitif déloyal envers ses partenaires…

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Tradition et boulots précaires

… avec l’essor des bas salaires. »

C’est ce qu’a déclaré il y a deux jours le secrétaire d’Etat allemand aux Affaires européennes, le SPD Michael Roth, dans un entretien à l’AFP.
Il annnonce une correction.

Cette dépêche AFP se trouve sur le site de Libération*, et en fichier joint*.
Aussi sur rtl.fr*,  rtl.be*.

Ainsi, la vérité des secrétaires d’État varie. En fonction de quoi? On se le demande.

Cette vérité ministérielle d’aujourd’hui, mes bons auteurs la disent depuis des années, et moi je l’écrivais sur ce site dès le 30 mai 2012.

…À quoi donc reconnaît-on un bon auteur?

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 * Je multiplie les liens à dessein, car c’est typiquement le genre d’info qui se fait expurger d’Internet à plus ou moins brève échéance. Ben oui, Internet est expurgé, le réseau des réseaux est aussi bigot et prude qu’il se la joue affranchi et audacieux. Il est censuré comme un code de morale puritaine. À chacun sa morale bien sûr, et celle d’Internet est liée à la raison d’État ou des États. Leurs obscénités peuvent être nos vérités. C’est un autre et intéressant sujet à propos duquel j’ai quelques exemples croustillants, vous aussi peut-être, vous pouvez me les signaler, pour une prochaine rigolade – parfois un peu jaune ou dents serrées, je sais.

Mais qu’est-ce qu’un bobo?

En avion, « The best ‘Upper Class’ seats » (ausbt.com.au)

Bonjour!

…Ah, les bobos.

L’appellation est due à l’Américain David Brooks, un journaliste conservateur-glamour-fragrance-moderniste.
Si vous lisez le chroniqueur économique Éric Le Boucher dans Le Monde, vous aurez un peu de ça en français. Il y en a des centaines d’autres dans toutes les langues, que pour ma part j’ignore autant que possible. À première vue, ça fait nouveau et intéressant, mais l’effet ne dure pas: c’est l’éternel conservatisme, re-looké, tuné, habillé chez, vu à la télé.

Brooks est fier d’appartenir à cette couche sociale qu’il a baptisée et longuement décrite dans son livre fondateur, Bobos in Paradise, publié en 2000.

« Diplômé de l’université de Chicago en histoire, il commence sa carrière comme reporter au Wall Street Journal, et comme éditorialiste au journal néoconservateur The Weekly Standard. [Vous voyez où son intelligence s’arrête.] On lui doit le terme bobo, contraction de bourgeois-bohème, traduction de l’anglais bourgeoisbohemian, qu’il emploie dans le livre intitulé Bobos in Paradise; l’auteur regroupe sous ce terme l’évolution et la transformation des yuppies des années 1980. » (Wikipedia en
français.)

Sociologiquement, les Américains n’aiment rien tant que parler de « classe moyenne », un terme descriptif aussi peu signifiant que possible, on voit tout de suite pourquoi: l’expression « classe sociale » sent le soufre depuis que Marx, Engels, et d’autres, lui ont donné le lustre que l’on sait. La paix civile US après la seconde guerre mondiale s’alimentait de la conviction de chacun, de pouvoir un jour être de la middle class. Un ouvrier devenu contremaître chez General Motors était, jusqu’il y a peu, disons jusqu’en 1980, année de l’élection de Ronald Reagan, supposé accéder à ce rang vers l’âge de 45 ans: une maison pavillonnaire, une voiture par membre de la famille de plus de seize ans, les enfants à l’université.

Ce fondement du contrat social US de l’époque est en passe d’être minutieusement détruit par l’offensive Walmart, dont le management a prévu dès les nineties de faire baisser les salaires chez ses fournisseurs, les grandes firmes US, de 25 dollars à …9. Walmart exigeait et obtenait leurs livres de comptes, pour leur montrer comment il y avait moyen de faire baisser leurs prix. On ne doit pas être loin de l’objectif aujourd’hui – pour ceux qui ont conservé leur emploi en tout cas, vu la délocalisation concomitante, consécutive et massive en Chine. (Cette offensive est loin d’être une cause première, mais bon, je simplifie. Au sommet historique du modèle, le revenu du patron US était de 40 fois celui de son ouvrier le moins bien payé, alors qu’aujourd’hui ce rapport est de 450 fois le salaire …moyen! La mécanique de fond dont Walmart est l’emblème, c’est la machine à accroître les inégalités.)

Cependant, les bobos de notre auteur Brooks ont quitté la middle class, et même l’upper middle class.
Le titre complet de son livre est en effet
Bobos in Paradise: The New Upper Class and How They Got There (Wikipedia en anglais): « Nouvelle classe sociale supérieure » , pas moins, classe sociale supérieure des nouveaux arrivés.
Yuppies leur allait très bien, et Brooks voulait remplacer ce terme devenu critique.
Il a réussi, car le besoin de confusion est très grand. Son
panégyrique à la gloire d’un certain milieu social a été célébré comme une contribution à la sociologie. Il a pris une place vacante, grande ouverte, et aujourd’hui, on parle de bobo pour toutes sortes de types sociaux qui n’ont rien à voir avec l’appellation d’origine.

Ainsi, à l’émission d’humour On n’est pas rentrés, sur Radio Première (Rtbf, 16h10-18h), il y a une rubrique dédiée aux bobos qui parle en réalité des professionnels bruxellois, sinon saint-gillois, souvent quadras et quinquas, arrivés à un niveau où on aime se croire échapper au sort du salarié commun. Cette rubrique sort en bouquin, les collègues de l’émission font sa pub, ils sont au micro, bien. Le sous-titre peu vendeur qui manque est: Soubresauts mentaux des urbains bac-plus X de plus de trente ans, en terre de néo-libéralisme avancé.

Ailleurs, dans une certaine jeunesse en mal de conformité, on appelle bobos toute personne un peu intello et adepte du bio.

Et de même, en tous milieux, sera qualifiée de bobo la personne dont l’interlocuteur se sent snobé par des positions moralistes, écolo ou new-age, convaincu cependant que, pour autant, elle est aussi compromise qu’elle-même, ou plus, dans la course à l’abime plus ou moins aveugle du « système » .

C’est cool! Désormais chacun a son bobo.

Et si on vous en traite, puisque le terme est devenu négatif, que le corollaire vous console: chacun est le bobo de quelqu’un.

La bouboucle est bouclée. Doublé d’une métaphore du bégaiement, Bobo a atteint la totale perte de sens. Le terme satisfait par là une loi de notre monde crépusculaire, énoncée par Castoriadis dans La montée de l’insignifiance.
Tant que loi de l’insignifiance est satisfaite, le monde finissant n’est pas fini.

C’est pas beau-beau ?

Allons! Bobonne journée, bobonne soirée.

Guy

C’est un droit !

Photo RTC – Belga

Bonjour,

Il était question chez Eddy Caekelbergs, lors de son émission quotidienne, « Face à l’info », ce mardi 28 février, des événements inédits survenus dimanche au siège de l’entreprise Meister de Sprimont.
Des « malabars » « surentraînés » , dixit Thierry Giet,
venus d’Allemagne où se trouve l’actuelle maison-mère, équipés de gilets pare-balles et de battes de base-ball, sont venus tenter d’emporter des camions et des pièces du stock.
La police, appelée par des salariés du site, se serait contentée de les reconduire à la frontière, sans les désarmer, en ne relevant l’identité que de deux sur une vingtaine, des têtes de cogneurs cinématographiques dont les photos figurent dans la presse.

Ô vertueuse Allemagne à l’angélique timonière: doucement ! – « Vertueuse », pas tueuse !

Le représentant du patronat wallon, présent à l’émission, a tenté, tout en déclarant que pareils actes ne pouvaient être acceptés, de dévier le débat vers les séquestrations de membres du management par des travailleurs. Cela se serait produit à quatre reprises en 2011. Sur ce point, le président faisant fonction du Parti Socialiste, Thierry Giet, l’a mouché fermement, et il n’a pas insisté. Il a été dit que la séquestration du patron chez Meister à Sprimont aurait consisté à le retenir deux heures de plus qu’il n’aurait voulu pour « négocier ».

À la radio, l’éminence patronale s’en est prise à ceux qui se plaisent à parler de violence quand une entreprise licencie, ferme ses portes, ou délocalise. « C’est peut-être dur, mais la vie est dure » , a-t-il ajouté, faisant écho à ce merveilleux aphorisme de la patronne du Medef français: «  Dans la vie, la santé est précaire, le bonheur est précaire, tout est précaire. Je ne vois pas pourquoi le travail ne serait pas précaire. » Le travail doit être précaire, et pas pour tout le monde, inutile de faire bac plus cinq pour le comprendre.
L’on voit à la profondeur de cette philosophie que les chefs d’entreprise méritent amplement leur place dans les débats de société ou sur l’enseignement, où ils ont fini par se faire considérer comme indispensables, sans qu’aucun participant, en particulier aucun journaliste, ne conteste leur participation. (Les démentis seront bienvenus!)

Je passe sur le fait que le patronal intervenant a longuement exprimé cette idée: le manque de docilité des travailleurs nuit à l’image de la région et fera fuir les investisseurs.
Pour le coup, il faut relever La Région! Pour cet objectif unanimiste, consensuel et patriotique, baisser la tête est le seul geste qui convienne à la force de travail.

L’humilité ou l’humiliation consentie des salariés devrait sauver une région où les possédants ont le droit sacré, le droit de « LA » propriété, de casser une entreprise performante sur l’autel de la rentabilité mondialisée.

J’ai surtout noté que l’éminence patronale à l’accent pesant s’est retranchée derrière l’affirmation que délocaliser, pour une entreprise, est un droit.

Intéressant! Nous approchons là d’un aspect central de la question sociale.

Le fait qu’un patron en soit à défendre la crudité de l’argument, montre qu’il a peu d’idéologie en réserve et qu’il approche d’une vérité, l’injustice foncière du régime – qui est aussi, sur un plan logique, la cause de l’enraiement bientôt dramatique de l’économie et de la société (démonstration prochaine en dix lignes, si je n’oublie pas, ou, pour les impatients, chaque jour en deux mille, sur le blog de Paul Jorion, avant la grande démonstration du réel…)

Malheureusement, ni le président Giet, ni la députée écolo bruxelloise, Zoé Genot, ni le secrétaire général de la FGTB wallonne, Thierry Bodson, ni le journaliste hôte de cette assemblée, aucune de ces personnes présentes sur le plateau n’a relevé que la prééminence du droit de propriété des moyens de vie du grand nombre, dévolu à quelques-uns, sur la plupart des autres droits, devrait à tout le moins être mise en débat, questionnée et encadrée juridiquement, sinon jugulée, supprimée, ou mise à cette place de variable d’ajustement que les économistes du sérail attribuent à la « main-d’oeuvre ». …Car, oui, il y a cette chienne de question humaine dans l’entreprise, rétive aux eaux glacées du calcul économique.

Malheureusement, personne n’a évoqué une violence systémique, intrinsèque au salariat, sur la réalité de laquelle les travailleurs en péril de licenciement, et leurs familles, ne se trompent pas une seconde.
Tout observateur pas totalement idiot, moi par exemple, ou vous qui me lisez, sait reconnaître dans l’affaire Meister un scénario mille fois joué depuis dix ou vingt ans, dans la robinetterie allemande, dans le décolletage en Haute-Savoie, sur le terrain de chasse de Bernard Tapie avant la case prison… : une entreprise performante aux métiers pointus se fait racheter, l’âge de la retraite venu pour le fondateur ou propriétaire, par un groupe international ou un fonds de pension, qui va extraire le savoir-faire, les machines éventuellement, les carnets de commande, la marque si elle a une valeur marchande, délocaliser le tout, et abandonner une structure dévitalisée à la faillite et aux plans sociaux plus ou moins à charge des pouvoirs publics du pays d’origine.

La banalité et la systématicité de ce processus sont parfaitement connues de chacun des intervenants dans cette émission – sauf peut-être du représentant patronal qui est bien obligé, pour survivre moralement, de cultiver l’art d’ignorer les pauvres (J. K. Galbraith), qui est l’art d’ignorer les causes de la pauvreté. Mais aucun n’en parle!


Que la liquidation de Meister soit légale, qu’elle soit « un droit », montre bien l’arriération de la démocratie représentative à bout de souffle et l’arriération de son droit napo-léonin.

Et que, malgré les invectives de « musculation » jetées par chaque camp à l’autre, la concertation sociale semble rester l’horizon indépassable, l’impératif catégorique et l’invariant anthropologique des gauches représentées par madame Genot et messieurs Giet et Bodson, laisse songeur.

Enfin, « songeur », c’est une façon de parler.
Nous ne le sommes guère
en ce point, il me semble. Nous savons faire deux plus deux.
« Ils vont regretter de nous avoir appris à lire! » , me dit un optimiste de mes amis.

…Eh bien, bonne journée!

Une mise en perspective de la grève de l’hiver 1960

Grève de 60
Bonjour,

Voici un entretien utile pour ceux qui n’ont pas trop de temps ni d’envie à consacrer à cette question, à l’heure où toutes sortes d’interprétations plus ou moins idéologiques se répandent.

(Signalons au passage que La fonderie, à Molenbeek, près du canal, est un endroit à la fois agréable et intéressant, dont on sort plus cultivé et, peut-être, plus intelligent.)

Bonne lecture!

Guy

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Hiver 60-61 : « Il ne s’agissait pas d’une grève pré-révolutionnaire »

La « Grande grève » était-elle vraiment été la « Grève du siècle » ? Quels contextes économiques, social et communautaire expliquent un tel phénomène ? En 2010, un tel événement peut-il encore surgir ?

 Entretien avec Jean Puissant, historien, président de la Fonderie (musée de l’industrie et du travail de Bruxelles)

https://www.revuepolitique.be/hiver-60-61-il-ne-sagissait-pas-dune-greve-pre-revolutionnaire/  ou PDF ici.